vendredi 14 juin 2019

Le tirage en Écosse, Pâques 2018: partie 2




 Vendredi matin, il fait un temps radieux sur Bankfoot, Louise nous attend à la cuisine, elle a pris congé aujourd’hui pour que nous puissions préparer le tirage qui aura lieu demain. Scott est justement au salon avec son matériel pour faire les tableaux où l’on collera les petits drapeaux. La maison est de nouveau redevenue une ruche, ça bourdonne d’activités. Y a aussi les propriétaires qui sont revenus et qui vivent dans la partie arrière de la maison, jusqu’à ce que le tournoi soit terminé. Après, Louise, Jacob et Joshua devront quitter, leur bail étant échu.

Nous partons Ben, Louise et moi à Perth pour faire quelques achats, dont les ingrédients nécessaires pour faire des crêpes dimanche matin, que nous mangerons avec le sirop d’érable apporté dans nos bagages. Après tout ce sera Pâques, ce sera une bonne occasion pour faire découvrir les crêpes au VRAI sirop d’érable à nos ami(e)s.

En après-midi, nous allons faire un tour au palais pour voir avec Stephen si tout est en place pour demain. Il y a une petite lice aménagée pour que quelques combattants de la SKL puissent offrir des démonstrations de combat aux illustres invités avec qui nous dinerons. Benoit confirme avec Stephen que le tirage a lieu juste devant la chapelle, et qu’il soit bien filmé en direct pour nos internautes. Ce dernier nous informe de la marche à suivre pour se rendre au diner le lendemain, y a un protocole à respecter. Y aura aussi des journalistes sur place, qui veulent faire une entrevue avec Benoit. Ce sera assurément une journée fort occupée et très importante pour tout le monde : Ce sera l’annonce officielle du tournoi de Scone, pour l’IMCF, une fenêtre à la BBC et pour les combattants participants, le dévoilement de leur « pool » (leurs adversaires au premier tour).

C’est pourquoi on ne tarde pas trop et qu’on s’en retourne manger à la maison et s’assurer que tout est prêt pour demain. Notre soirée se passe à découper nos petits drapeaux et les étiquettes qui vont avec, tout en sirotant une bière.

Samedi matin, tout le monde est sul piton et prêt à affronter cette journée marathonienne. J’ai mis mes talons hauts et mon veston dans un sac pour le diner, parce que nous serons à l’extérieur tout l’avant midi, c’est-à-dire sur le gazon et la gravelle avec le froid et l’humidité. Donc j’ai des bottes et mon manteau et comme à mon habitude, j’ai quand même froid. Je me tiens près de la lice avec Louise, tandis que Benoit est nulle part et partout en même temps, tantôt discutant avec Stephen ou les combattants, tantôt répondant à un journaliste local. Chris vient nous rejoindre en milieu d’avant midi, le petit manteau, le kilt et les jambes nues, il semble totalement insensible au froid ambiant, c’est un vrai Écossais.




Avec Chris Capaldi

Autour de la lice, les Écossais discutent avant les démos

 Au bout d’un moment, j’ai trop froid, je rentre me réfugier dans la salle où sont installés les combattants, du moins leurs stock et leurs armures, c’est là qu’ils vont se changer pour la démonstration en après-midi. C’est aussi là où Benoit a donné son entrevue avec un journaliste de la BBC un peu plus tôt. Je me demande dans combien de temps nous irons diner et c’est avec cette petite incertitude que je décide de retourner dehors pour m’en informer. Je ne vois plus personne, sauf Stephen qui s’approche à grande vitesse en parlant dans son walkie-talkie, aïe! Je l’entends dire dans son appareil : « I found her » On m’attend et je n’ai pas eu le temps de mettre mon veston et mes souliers. Je le suis sans hésiter, vaut mieux ne pas faire attendre nos hôtes. Il m’escorte jusqu’à une porte, jamais vue jusque-là, sur le côté du palais, Louise, Chris et Benoit y sont et visiblement m’attendent avant d’entrer. Je me sens honteuse mais à voir leur air sans trop d’inquiétude, je me dis que ça ne doit pas faire trop longtemps qu’ils m’attendent. Stephen nous fait entrer dans un petit hall et un domestique (est-ce qu’on peut encore utiliser ce terme aujourd’hui?) vient nous libérer de nos manteaux et nous offrir un apéro avant de passer dans la pièce à côté. Je regarde piteusement Benoit je suis habillée un peu trop décontracte je pense, on essaie à deux de placer judicieusement mon châle et nous entrons dans un petit salon fort agréable. C’est dans cette partie du palais que vit la famille Murray. Nous saluons d’abord Lady Mansfield que nous avons rencontré il y a quelques mois, son fils William que nous connaissons pour l’avoir rencontré, il y a 18 mois à New York et Lord Mainsfield que nous rencontrons pour la première fois. Ensuite nous saluons son frère James Murray, le Major Monteith et son épouse, le maire Dennis Melloy et son épouse et Toby Metcalf le grand boss de Stephen. Le vice-premier ministre John Swinney, nous rejoindra un peu plus tard.

On se retrouve à tous converser, le feu qui brûle dans la cheminée réchauffe l’ambiance qui est tout de même étonnamment relax. Nous prenons l’apéro en faisant connaissance avec ces gens qui rapidement nous mettent à l’aise qui nous font presque oublier leur rang social.  Monsieur Metcalf vient me rejoindre en moins de minutes et j’ai du mal à cacher ma surprise quand il m’aborde d’emblée à propos de mon mémoire de maîtrise en anthropologie sur Bicolline. Apparemment il a fait ses recherches et il est vraiment curieux à propos de nous, mais aussi sur ma façon de percevoir ce nouveau sport. Il me demande combien de temps nous serons à Perth et inévitablement j’évoque notre voyage éclair…en autobus avec tous les désagréments rencontrés à l’aller. Nous rions de bon cœur et me dit qu’il nous trouve courageux, un peu fou mais surtout passionnés.

Puis Lady Mansfield nous signifie que c’est le moment de passer à table, en fine diplomate, elle a déjà décidé où chacun doit s’asseoir, je le réalise quand elle me présente le Major qui prend place à ma droite, le seul qui peut converser en français. C’est un choix judicieux et respectueux envers moi qui ne maîtrise pas aussi bien l’anglais que Benoit. Le repas est très simple, un pâté de viande délicieux et un plat sans gluten pour Benoit. Mon voisin de table me demande, tout de go, en pigeant dans son assiette, ce que je pense de la situation actuelle en Catalogne. Mais son regard en coin ne trompe pas, il semble un peu amusé et curieux à la fois. Je suis certaine qu’il se doute que je suis une fervente indépendantiste chez-moi, je ne m’en cache pas, et je poursuis avec lui la discussion qui est franchement agréable. Il m’explique qu’il possède une villa depuis de nombreuses années dans le sud de la France et c’est pourquoi il a fini par apprendre la langue de Molière. Lady Mansfield et son époux se font face, chacun aux extrémités de la table, visiblement habitués à ces rencontres protocolaires ou non. Ça me rappelle Downton Abbey, mais ici le maître du jeu c’est clairement Lady Mansfield. Je ne peux m’empêcher de sourire quand elle rappelle à son fils et son mari de moins parler et de finir de manger si on veut aller faire le tirage. Si l’encadrement demeure assez protocolaire, le diner en soi ne l’est pas vraiment, je n’irais pas jusqu’à raconter des blagues bien grivoises, mais on arrive à être confortable.

Après le dessert et le thé, pris assez rapidement, nous ne nous éternisons pas et passons tous dans le hall, où nous attend Stephen, pour prendre manteaux et parapluie parce qu’il pleut. Tout est orchestré, nous défilons en procession deux par deux jusqu’à la chapelle où Benoit commence le tirage. Il fait son introduction en rappelant que ce sera la première fois en 400 ans qu’aura lieu en Écosse, un tournoi de béhourd. Il ajoute que l’IMCF est fier de le présenter à Scone palace, là où a eu lieu le couronnement de tous les rois écossais. Il invite ensuite à tour de rôle les dignitaires à venir piger les pays dans chacune des catégories. Monsieur Swinney est arrivé juste à temps, avec son jeune fils, pour se joindre aux autres. 


Scott avec le tableau, ça a l'air de rien mais on a travaillé fort là-dessus.


Au bout d’une heure, le tirage est terminé et bien que le temps soit passablement pluvieux, la plupart des invités d’honneurs et des visiteurs sont curieux de voir les démonstrations de combat. Ils s’agglutinent donc autour de la lice, Benoit, lui, est occupé à donner une autre entrevue, alors que moi je retourne au chaud et au sec dans le petit café à l’intérieur du palais. D’ailleurs le reste des invités y est, à siroter une tasse de thé ou de café.

Une partie de l'équipe écossaise, des gars bien sympatiques ces Écossais!


En fin d’après-midi, nous retournons à Bankfoot et soupons modestement de quelques trucs achetés à l’épicerie la veille, en compagnie de nos amis. Tous dans le petit salon, nous discutons des pools, probablement comme beaucoup de combattant(e)s à travers le monde, ceux et celles qui participeront à notre tournoi.

Dimanche matin, c’est Pâques et bien que nous ne soyons absolument pas pratiquant, nous conservons quelques traditions, surtout celles qui sont culinaires. Faut dire que le sirop d’érable est sans nul doute notre aliment le plus ancien, cadeau des Amérindiens. Dire qu’ils nous ont appris à survivre dans ce rude climat, nous ont enseigné multiples choses essentielles, en échange, nous leur avons donné les outils pour s’autodétruire, des armes à feu, mais surtout de l’alcool.

Je prépare donc une bonne quantité de pâte à crêpe sous l’œil attentif de nos hôtes, ça me rappelle la cuisine de mon restaurant il y a déjà plusieurs années. L’avantage c’est que c’est pas compliqué et tellement bon, surtout avec le sirop.

Ben qui nous présente un ambré 2017 ;-) 

Après le déjeuner nous allons à Perth pour visiter un tout petit peu, c’est la troisième fois que nous venons à Scone en moins d’un an et nous n’avons toujours pas vu le cœur de la petite ville. Nous en profiterons pour distribuer des pamphlets car y paraîtrait que cette tâche a été un peu escamotée, l’administration du palais était sensé faire des pamphlets et en distribuer depuis longtemps. Lorsque nous en avons parlé directement à Lady Murray hier, elle est partie chercher une boîte pleine qui traînait dans leur bureau. Elle semblait un peu contrariée, je me demande si c’est notre approche ou parce qu’il y a eu négligence envers notre événement, j’aime mieux opter pour la seconde hypothèse. Nous en apporterons quelques piles avec nous et irons les distribuer un peu partout. Nous irons en transport en commun, un autobus nous prendra sur la rue juste à côté. Ben est toujours un peu curieux de rencontrer des gens qui pratiquent le même métier que lui pour comparer.

Mes lunettes soleil...au printemps en Écosse.

En Écosse comme dans d'autres pays européens, on se stationne comme on veut et comme on peut, différentes directions et souvent sur le trottoir.

C'est pas clair mais c'est Jacob et Benoit dans le petit chemin de traverse entre la maison et la petite épicerie.

Je suis toujours ravie de voir que les vieilles maisons servent.

Ça aussi c'est quelque chose que j'ai vu en Flandres, on donne un nom à sa maison et il n'y a pas de numéro de porte visible...

Sont classes ces bus.

Au bout d’une quinzaine de minutes, nous sommes directement au milieu de Perth et décidons d’aller au bureau touristique pour laisser d’autres pamphlets. La p’tite dame nous dit que quelqu’un est venu en porter une pile il y a un mois de ça. En principe c’était sensé se faire au mois de décembre après notre assemblée générale, je pousse un long soupir et je roule probablement des yeux, Ben fait mine de ne pas trop remarquer et laisse tout de même d’autres publicités pour notre tournoi.

Nous passons une petite heure à entrer dans les bistrots, pubs, magasins ou tout autre endroits qui nous semblent propices. Évidemment les gens sont curieux et veulent savoir ce que nous annonçons, ce qui nous indique qu’il y a eu peu de publicité de faite jusqu’à maintenant. À l’occasion, certains se souviennent du tournoi en juillet dernier ou bien ils ont vu ou entendu une entrevue donnée par Benoit ou un membre de la SKL. Mais c’est assez unanime, tout le monde est enthousiaste et la plupart veut y venir.

On s’arrête pour prendre un café et on repart, cette fois, nous allons au centre sportif, les gens au comptoir sont très très curieux et posent beaucoup de questions. Du moment que les sportifs comprennent que ce n’est pas du grandeur nature (GN ou LARP) ils sont généralement excités à l’idée d’essayer ce « nouveau » sport.

Nous allons aussi en distribuer dans les épiceries à grande surface, et bientôt nous nous arrêtons pour manger un fameux fish&chips. Moi je suis amusée quand j’entre dans les commerces et qu’on m’aborde avec un « allo » ou « aye » qui semblent faire partie des formules de salutation ici. Pour la Québécoise que je suis, c’est comme si je rencontrais chaque fois des amis. Mais en même temps, dans la langue écossaise on entend souvent l’influence du vocabulaire français. Disons que l’histoire de l’Écosse et de la France sont souvent entremêlée et qu’avoir un ennemi commun (l’Angleterre) ça favorise les rapprochements et les alliances.     

En plein coeur de Perth

Un distributeur d'oeufs frais et de pommes de terre. :-o

Pour donner une idée des prix dans ce petit resto de fish & chips. Notez que c'est environ 1,70 canadien pour une livre sterling, un peu plus cher que l'euro. Moi je doublais systématiquement. Ainsi j'avais pas de mauvaise surprise.
  

Une des choses étranges qu'on me dit que je doive absolument goûter si je veux manger écossais, c'est une barre mars frite.


En fin d’après-midi, il commence à faire froid et nous sommes fatigués, nous retournons à Bankfoot par le même autobus avec la satisfaction d’avoir fait du bon travail. Bon du travail qu’on aurait aimé mieux ne pas faire mais ça nous aura permis de prendre le pouls de la population directement. Nous passons à la petite épicerie du village avant de rentrer au chaud et finir notre journée avec nos amis, c’est notre dernière soirée, car nous reprenons le bus tant redouté demain soir. Cette fois nous voyagerons de nuit, en espérant dormir une bonne partie du trajet.

La journée du lundi est assez tranquille puisque tout le monde travaille, c’est pourquoi nous en profitons pour aller nous balader au village, en quête d’un pub où nous pourrions prendre un vrai bon repas. Nous trouvons le parfait pub, mais il s’avère qu’il est fermé la semaine pendant la saison morte. Nous sommes déçus parce qu’il ne semble n’y avoir aucun restaurant, du moins aucun d’ouvert. Il n’y a personne dans les rues, c’est tellement tranquille, trop tranquille! Après avoir déambulé de long en large, et pris quelques photos, nous allons à la seule petite épicerie qui rappelle le magasin général de n’importe quel village ou de quartier. On en profite pour se faire des provisions pour ce soir dans l’autobus et une fois dans notre chambre on chargera les batteries de nos téléphones au maximum.  

Remarquez sur le panneau «dogs welcome», ah que j'aime ce pays et ses gens!


Un pays où il pleut beaucoup, je trouve l'idée assez ingénieuse, c'est entre le trottoir et la rue..

Un arbre exotique pour moi.






En fin de journée, Louise nous reconduit à notre terminus d’autobus, ce n’est qu’un au revoir, il ne se passera même pas deux mois avant que nous revenions. Nous savons aussi tous les trois que durant ce laps de temps nous allons devoir courir chacun de notre côté de l’Atlantique pour finir de préparer ce gros événement.

Le ciel est dégagé nous pourrons voir un peu de paysage avant qu’il ne fasse nuit, dans le bus, loin des toilettes, nous essayons les prises à côté, elles fonctionnent yeah! Bon je ne suis pas certaine que nous en aurons besoin, mais c’est une sureté de plus, notre sac à dos est plein de stock pour manger et boire. Finalement nous dormons la moitié du trajet, un trajet qui se fait beaucoup plus rapidement parce qu’il se fait au milieu de la nuit. Résultat quand on arrive à la grise gare, nous sommes un peu plus reposés et nous avons de quoi déjeuner et grignoter jusque dans l’avion qui nous ramène à Montréal. Faut être un peu fou quand même, faire tout ça en moins de six jours, définitivement, le mois prochain nous restons 2 semaines!  










mercredi 12 juin 2019

Le tirage en Écosse, Pâques 2018: partie 1






Mercredi 28 mars, nous nous envolons pour Londres, un vol de 5 heures sans Internet, téléphone ou texto, des vraies vacances! Évidemment je blague car la machine (les projets, les idées, les pense-bêtes, les vérifications, etc.) continue de rouler même en avion et probablement le fera pendant notre trajet en autobus. Nous sommes excités et nerveux, c’est gros ce tournoi! Déjà nous avons notre dîner mondain au palais où nous sommes conscients que nous y serons les étranges énergumènes Québécois, mais Benoit a aussi quelques entrevues à donner. Depuis qu’il a eu cette mini entrevue le mois dernier avec la BBC, au téléphone pendant sa pause au travail, il est de plus en plus sollicité. Il doit justement donner d’autres entrevues cette fin de semaine, la BBC est très intéressée par ce que nous faisons à l’IMCF.

Notre premier contact avec l’aéroport Heathrow est décevant, en fait c’est froid, les gens évitent les contacts visuels, ils semblent blasés. Tout est mal indiqué, on tourne en rond, beaucoup trop à notre goût. Le pire reste les ascenseurs (qui s’arrêtent à notre étage 1 fois sur 3) pour joindre le stationnement ou la navette, ce qui est notre cas. J’ai jamais vu autant de monde attendre aussi longtemps pour sortir. On envisage même de trouver les escaliers et descendre par-là, cette fois nous avons juste une grosse valise et deux bagages de cabine, nous avons le luxe de choisir. On ne les trouve pas, et pas d’agent ou de commis, comme dans de nombreux aéroports pour aider les voyageurs à s’y retrouver. Au bout d’une vingtaine de minutes, nous affichons probablement le même air renfrogné que les gens autour de nous. Nous finissons par arriver à notre navette, elle nous amène à la gare d’autobus du centre-ville, nous avons acheté nos billets par Internet et nous espérons arriver à temps. En achetant longtemps d’avance, les billets sont vraiment pas cher, mais si on manque notre autobus, le prix aura doublé. Donc on court!

On met une bonne dizaine de minutes pour trouver des toilettes qui sont plus ou moins propres, la gare en elle-même est un peu repoussante, tout est mal indiqué, les employés ont l’air bête et peu enclin à aider les voyageurs perdus, ils en font le moins possible. Y a des itinérants couchés un peu partout et les lieux ne brillent pas par leur propreté. Quand on trouve notre autobus, il y a déjà un bon groupe de voyageurs qui attend le même bus, bien sûr plus aucune chaise n’est libre. Comme c’est un autobus qui se rend jusqu’en Écosse, j’imagine que plusieurs de ces passagers profitent du congé Pascal pour se rendre dans leur famille.

Nous avons décidé de prendre le bus par souci financier : le vol de Londres à Glasgow, juste à l’aller, nous aurait coûté (pour les deux) un bon 250-300$, plus le bus pour aller ensuite à Perth, une soixantaine de dollars, puis un taxi vers Bankfoot, une cinquantaine de dollars

L’autobus de Londres jusqu’à Perth nous en coûte, à deux et à l’aller, une quarantaine de dollars, nous descendons à une quinzaine de kilomètres de Bankfoot où nous payerons 50$ de taxi. La décision s’est prise assez rapidement.

Le mois prochain, nous devrons toutefois nous y prendre autrement pour le tournoi car nous ne pouvons prendre le bus avec plus d’une grosse valise par personne dans la soute à bagages. Les combattant(e)s ne pourront pas envisager cette option.

Bien sûr, c’est un trajet de 10-12 heures, mais nous avons de quoi grignoter, une bouteille d’eau, il y a du Wi-Fi et des toilettes dans le bus, on regardera le paysage, on jasera ou, on dormira. De toute façon, quand il arrêtera en chemin, on fera le plein ou le vide…

J’ignore pourquoi, normalement nous sommes plus prévoyant, mais cette fois-ci, nous avons manqué notre coup. C’est très long 12 heures de bus! Surtout pris sur l’autoroute dans un traffic monstre et sous la pluie. D’abord, nous n’avions pas de Wi-Fi, les prises pour charger nos appareils ne fonctionnent pas, ainsi après avoir épuisé nos batteries sur des jeux, nos appareils sont morts. Je suis incapable de lire en voiture ou autobus, ça me donne la nausée. Aussi on a apporté de quoi grignoter, mais rien d’assez consistant pour nourrir suffisamment sur une aussi longue période. Que dire de nos deux bouteilles de 500 ml d’eau? Pour compléter ce tableau apocalyptique, nos sièges sont tout près de la toilette qui a cessé de fonctionner quelques heures après notre départ, et je n’ai pas dit que les passagers ont cessé de les utiliser !!  L’odeur !!  

Est-ce que ça pourrait être pire? Oui! Je sais pas pourquoi j’ai cru que l’autobus arrêterait en chemin autrement que pour faire descendre les passagers à leur destination. Birmingham, Liverpool, Manchester, Lancaster, Glasgow, les quelques villes où nous n’arrêtons que quelques minutes. On le sait parce que le chauffeur les annonce et elles apparaissent sur l’écran lumineux au bout du couloir. Si au moins on pouvait voir du paysage, la brume, la pluie, et la buée sur les vitres nous empêchent de voir, surtout quand il commence à faire noir. Si nous étions assis devant, nous pourrions avoir toujours une idée du lieu où nous sommes et du temps approximatif qu’il nous reste, mais tout au fond de l’autobus, on ne voit rien du tout et comme nos téléphones sont morts, on ne peut se fier aux GPS, le trajet nous semble une éternité…en enfer. On a beau faire de petites siestes, mais ça reste insuffisant, c’est tellement long. On ne peut même pas se fier sur les places qui pourraient se libérer et changer de place, y en a très peu et chaque fois qu’elles se libèrent, les passagers qui montent les prennent aussitôt. Au moins quand on s’arrête à Glasgow nous savons qu’il nous reste maximum 2 heures. À Stirling nous commençons à nous rapailler et à nous avancer parce que la moitié du bus y est descendue, là et à Glasgow.

Par chance, notre arrêt à Perth se trouve tout près de l’hôtel Econo lodge où travaille Jacob en ce moment précis, il y travaille de nuit, nous nous ruons à l’intérieur. Nous sommes ravis de le revoir, mais nous avons d’abord besoin des toilettes puis de manger, nous avons remarqué un McDo juste en face de l’hôtel, on espère qu’il soit ouvert malgré l’heure très tardive. Mais nous apprenons que si les lumières y sont allumées, c’est parce qu’une équipe d’ouvriers y travaillent, le nouveau restaurant ouvrira ses portes dans quelques semaines. Merde! On aboutit dans un genre de Couche-tard à 2 minutes à pied, c’est tout ce qu’il y a autour, nous revenons avec absolument rien de nourrissant, sauf peut-être mon sandwich pré-emballé. Jacob nous appelle un taxi et nous donne l’adresse à Bankfoot où il viendra nous rejoindre demain matin. Louise et Joshua y sont de toute façon et nous attendent ou auront laissé la porte déverrouillée.

Une chance que le trajet ne dure qu’une quinzaine de minutes, je ne supporte plus de rouler, mais le sympathique chauffeur nous fait oublier que sur 24 heures, nous avons passé plus de 20 heures sur la route, l’avion, la navette, l’autobus et maintenant le taxi. Et c’est en s’échouant tel un bateau sur un rivage bienveillant, que nous retrouvons notre lit dans la même chambre qu’en novembre. Si j’ai un conseil à donner aux Québécois comme nous, habitués à nos grands espaces comparés à la taille plus modeste des pays européens. « Ne jamais sous-estimer la distance et le temps de transport en Europe ».