jeudi 22 février 2018

Au pays des vikings!




« Bon, on a deux choix! » me dit Benoit « Soit on prend le vol direct à Copenhague à partir de Toronto, soit on prend un vol vers Paris à partir de Montréal, puis on prend un vol au prix régulier pour l’aéroport de Billund, parce qu’on n’a pas de vol direct Montréal-Billund. »

On est enfin en train d’organiser NOTRE voyage, depuis des semaines qu’il planche sur l’IMCF, qu’il répond à toutes les questions provenant des équipes partout sur la planète, qui vivent sur un autre fuseau horaire et qui veulent une réponse…hier. Par chance, Julia s’occupe des marchands et le Danois Magnus est sur le terrain et court déjà pour que tout soit prêt. N’empêche que Ben est toujours sur 56 dossiers en même temps, dont les réservations pour les tentes et les forfaits repas pour les arbitres et pour les équipes qui viennent de trop loin pour transporter leur stock de camping et qui veulent dormir sur place. L’Ost en fait partie, ainsi que les Japonais, les Néo-Zélandais et les Américains.  

 La plupart des participants débarquera à Billund qui est beaucoup plus près de Spottrup, là où notre tournoi IMCF 2017 a lieu. Notre priorité à nous, est de sauver des sous, il nous faut donc regarder les prix des vols Copenhague-Billund, Montréal-Paris, Paris-Billund, les trains, les autobus, les locations de voiture, etc. Sur Google Map on nous dit qu’il faut compter 1:30, 1:45 hrs pour nous rendre à notre destination à partir de Billund, alors que ça en prend 4 à partir de Copenhague.

Nous passons quelques jours à planifier, comparer, chercher jusqu’à ce que nous tombions d’accord : On passe par Toronto pour prendre le vol direct pour Copenhague et nous louons une voiture pour une semaine, et nous roulerons à notre rythme. Nous la réservons tout de suite, elle nous revient à 160$ (une aubaine!) c’est sensiblement le même prix que si nous prenions le train ou l’autobus allers-retours. Mais en plus nous pourrons nous véhiculer toute la semaine, faut juste faire attention car l’essence est dispendieuse. Quatre heures de route c’est vraiment pas grand-chose pour nous, toutefois, nous rendre du point A au point B peut être un challenge, à cause d’un élément primordial, on ne lit pas, on ne parle pas et ne comprenons pas le danois. Le GPS qu’on nous proposait coûte pratiquement le prix de la location de la voiture, donc j’ai proposé à Ben, qu’on imprime le trajet aller et retour sur Google Map et je serai comme d’habitude son co-pilote. Et puis après tout, on peut toujours demander notre chemin, y paraîtrait que l’anglais est couramment parlé.
La veille de notre départ nous envoyons un message sur notre réseau facebook, pour savoir si quelqu’un pourrait venir nous reconduire à l’aéroport, évidemment sur promesse de payer l’essence. Ma mère m’a toujours dit :

« Quand on demande rien, on obtient rien, donc n’hésite jamais à demander tu pourrais être surprise de ce que tu recevras. »

Et je dois dire que ça m’a souvent bien servi, mais sur ce coup-là, je suis plus ou moins confiante, nous sommes très dernière minute (comme toujours) et c’est un dimanche en fin d’avant-midi. Je reste un peu pessimiste là-dessus, on pognera un taxi, ça va nous coûter plus cher mais avons-nous vraiment le choix? Hors de question de prendre le transport en commun car nous sommes trop chargés comme d’habitude.

Dimanche matin, alors qu’on termine de paqueter notre bouffe de survie dans nos valises et que je finis notre lunch, Line, une amie qui n’habite même pas sur l’île et qu’on n’a pas vu depuis longtemps, me demande si on a toujours besoin d’un lift aujourd’hui. Wow! Deux heures plus tard, elle est chez-nous! Oh qu’on est contents! D’abord pour l’immense service qu’elle nous rend, alors qu’elle aurait très bien pu rester chez-elle tranquille et profiter de son dimanche de congé, ensuite parce que ça fait du bien de la voir, ça faisait si longtemps! On en profite pour papoter sur la route, puis elle nous laisse au débarcadère de l’aéroport, refusant net qu’on lui rembourse son essence. Ah ma mère et ses dictons tellement vrais!

Une fois à l’intérieur on retrouve Andrew et sa copine Annie, nous prenons les mêmes vols et une fois à Copenhague, nous nous séparons. Ils continueront en train tandis que nous prendrons l’armure d’Andrew et quitterons en voiture. Cette fois-ci, tout se déroule sans heurt et sans problème pour notre vol pour Toronto, puis quelques heures plus tard pour le Danemark.

Lorsque nous descendons d’avion, ça contraste avec notre arrivée à Buenos Aires deux mois plus tôt. D’abord nous sommes reposés et on ne crève pas de chaleur et tout est beaucoup plus calme, les Danois étant pas mal moins sanguins que les Argentins. De l’autre côté de la sécurité après avoir récupéré nos bagages, c’est calme et…blond. Bien sûr, il y a des touristes venus d’ailleurs, mais sur le fond on capte bien l’ADN viking. Le mélange nordique et germanique typique que nous imaginons volontiers parcourir, il y a mille ans, les mers à la recherche de terres et de trésors.

C’est la petite sirène d’Hans Christian Andersen qui nous accueille, assise sagement et enviant secrètement, peut-être, tous ces voyageurs bipèdes qui circulent autour ou qui s’arrêtent un instant pour la prendre en photo. Son créateur est l’un de mes conteurs favoris, j’ai lu la plupart de ses œuvres principales et je dois dire que parmi les grands auteurs du 19ième siècle, ce sont ses contes de fées qui ont le plus marqués mon enfance : La petite sirène, La petite fille aux allumettes, Le vilain petit canard, Les habits neufs de l’empereur, La princesse au petit pois, La petite poucette, La bergère et le ramoneur…Enfin





Pour nous rendre à la compagnie de location de voiture, c’est super complexe, nous devons prendre une navette par l’extérieur ou nous rendre dans une autre aile de l’aéroport et nous ne pouvons pas traverser avec les chariots, et il hors de question qu’on trimbale tout notre matériel à bras. Finalement, Ben part avec la navette pour aller chercher notre voiture et viendra me chercher à la porte. Sauf que, c’est pas bien clair, nous n’apercevons aucun panneau ou indication de stationnement quelconque et de l’endroit où nous avons laissé Benoit, c’est directement la rue, pas de zone d’accotement. Nous ne pouvons pas nous déplacer, sinon Ben ne nous retrouvera jamais. On n’a aucune idée où il pourra se stationner pour me prendre avec les bagages, on s’entend que si je peux m’engouffrer en 3 secondes au milieu du trafic, nous avons deux armures à entrer dans la valises plus nos autres bagages.

Pour aider c’est l’heure de pointe. Comme on ignore quelle voiture nous aurons, on scrute attentivement toutes les voitures qui viennent dans notre direction, jusqu’à ce que nous le voyions nous saluer. Nous apportons rapidement tous les bagages qui iront dans la voiture, Ben sort, les automobilistes ont pas l’air très contents, à leur tête nous devinons que ce n’est pas l’endroit pour s’arrêter et si nous ne voulons pas avoir de problème nous devons faire vite. Les gars embarquent rapidement les bagages et ne peuvent s’empêcher de s’extasier devant notre BMW louée au même prix, le concessionnaire n’avait pu avoir la voiture que Ben avait demandé (moi les chars je les repère par leur couleur pis encore…).

Bon vite vite vite faut décoller! Bye Andrew et Annie, on se revoit à Spottrup! Là le party va commencer, je sors mes papiers de google itinéraire.




Faut d’abord sortir du périmètre de l’aéroport et se diriger sur la bonne route, ce qui n’est pas si simple puisque nous n’avons pu nous stationner avant et prendre nos repères et évaluer le plan de match. Mes feuilles en main, j’essaie de ne pas me laisser impressionner par les noms qui à première vue se ressemble tous, donc difficile à lire avant d’être passée devant le panneau. Surtout rester calme! Se tromper de sortie dans ce genre d’endroit, c’est toujours un peu paniquant car tout se ressemble contrairement aux routes secondaires et rues de villes et villages.

Benoit n’a pu regarder notre itinéraire dans le stationnement du concessionnaire avant de venir me prendre avec les bagages à la porte, car j’avais notre itinéraire dans ma sacoche. Il ne peut maintenant regarder avec moi non plus, entièrement occupé à conduire une voiture louée, dans un autre pays, dans une autre langue, notre réussite à sortir d’ici, repose sur moi.

En me fiant en partie à mon instinct, on finit par se retrouver sur la E20 et par chance nous resterons dessus pour un bon 200 km, on peut enfin souffler! Contrairement à ce que je m’attendais (ne me demandez pas pourquoi) il fait un temps magnifiquement ensoleillé, et c’est super confortable. On ouvre la radio, comme nous le faisons régulièrement en voyage, on prend un bain médiatique, soit la radio, soit la télé ou les deux, nous écoutons la langue, la musique, les publicités, etc. À mes oreilles, le danois ressemble à de l’allemand mais en plus doux. Nous nous amusons, lors des pauses publicitaires, à essayer de deviner de quoi il s’agit.

On s’extasie devant le paysage de la mer qui s’étend à perte de vue à notre gauche et à notre droite lorsque nous quittons le Seeland (où est la capitale : Copenhague) pour traverser sur l’île de Funen pour nous rendre dans le Jutland, le nord du Jutland. Toute cette eau autour c’est vertigineux, ça me rappelle les Îles-de-la-Madeleine sauf pour les cygnes sauvages qu’on voit un peu partout ici. J’aime observer la faune ou les panneaux de traverses d’animaux, sur toutes les routes où nous voyageons, les cygnes, c’est une Première.

Nous grignotons nos collations, évitant de manger dans les restaurants des aires de repos qui servent surtout des burgers et de la pizza, trop chers pour nos moyens. Donc quand on s’y arrête c’est pour les pauses pipis et l’achat de bouteilles d’eau ou de café. On découvre aussi qu’il y a des douches à côté des toilettes, ce qui est vraiment pratique.

En fin d’après-midi, nous arrivons à Spottrup, en fait c’est le nom du château qui est situé à une dizaine de minutes de la petite ville de Skive, c’est en pleine campagne. Nous garons la voiture dans le stationnement du Centre sportif rattaché au musée et au château juste un peu plus loin. Une centaine d’unités sont déjà là pour nous recevoir et Magnus est sur place pour veiller à ce que tout soit installé correctement, son grand danois qui le suit comme son ombre. Évidemment j’essaie de l’amadouer comme je le fais toujours avec les gros chiens pendant que Ben discute avec Magnus concernant le travail qui reste encore à faire avant le début du tournoi, jeudi. Je suis toujours fascinée par sa voix profonde, ça m’avait frappé l’an dernier au Portugal. Le physique imposant, l’attitude calme et une voix aussi grave, il personnifierait bien Thor ou Saint-Nicolas! Bon bon je sais je sais, mon imagination qui s’emballe.





Il nous montre le coin des Québécois, il y a un drapeau du Québec sur une des tentes, y semblerait que c’est notre quartier, nous serons vingt Québécois cette année et nous dormons tous dans ces tentes. C’est la première fois que notre délégation est aussi grosse et c’est la première fois aussi que nous dormons sur le terrain. Chacune de ces unités accueille une à deux personnes, mais à deux ça ne laisse pas beaucoup de place pour les bagages, disons qu’on va laisser l’armure dans la valise de l’auto en attendant le tournoi.

Régis est déjà sur place avec sa copine Marie-Claude, ils sont partis une semaine avant pour visiter le Danemark, c’est eux qui ont revendiqué et réservé un coin pour les Québécois. Ils ont eu le choix, il n’y a pas grand monde encore, la plupart des gens arrivent demain et mercredi. Nous choisissons une tente et y mettons nos sleeping, oreillers et bagages et suivons Magnus qui nous invite à sa tente dans le campement décorum de son groupe de reconstitution historique, il veut nous montrer les médailles et nous donner les bracelets et les jetons de notre équipe pour le forfait repas.

Sur le chemin, nous traversons le hall du musée et ressortons de l’autre côté, dans le campement aménagé pour les marchands qui font aussi de la reconstitution historique. Puis longeons le château et la lice pour nous rendre chez les Danois. Sur place, tout le monde est occupé à installer adéquatement les tentes, leur mobilier ou à préparer le souper, pour ces gens, vivre comme au Moyen âge semble être aussi banal qu’à la maison au 21ième siècle. La cuisson se fait sur un feu de bois, avec des gros chaudrons de fontes, des ustensiles de bois ou de fer et les meubles sont en bois. Quand je regarde le sommier et la décoration de la tente de Magnus et sa copine, je les envie, il y a tant d’espace et les draperies et coussins moelleux réchaufferont suffisamment le couple cette nuit j’en suis certaine.

Quand nous retournons là-haut à nos tentes modernes et pourtant sûrement moins confortables que ce que nous venons de visiter, nous retrouvons en plus de Régis et Marie-Claude, Igor, Pat et Élie qui viennent d’arriver d’Allemagne, Benoit donne les bracelets et les jetons à Régis (représentant du Québec) pour qu’il les distribue, Benoit se doute bien qu’il risque d’être vraiment très occupé toute la semaine à partir de demain matin. Nous allons faire un tour dans le centre sportif, nous voulons voir comment sont organisées les installations sanitaires et la petite salle à manger laissant les autres s’installer à leur tour dans les tentes.

Avant de partir du Québec, plusieurs d’entre nous étions plus ou moins à l’aise à l’idée de ne pas avoir de douche privée. Comme c’était mon cinquième tournoi international, (le premier avait été avec Battle Of the nation) je savais que sur le terrain c’était toujours un peu rudimentaire, des douches portables louées, où étaient entassées plusieurs personnes en même temps. En Espagne il n’y avait pas vraiment de division hommes et femmes. Comme c’était notre premier camping en tournoi, j’ai eu soudainement des doutes et j’avais demandé à Benoit de s’informer. J’étais certaine que la plupart des Québécois ne seraient pas à l’aise avec l’idée de se laver nu en groupe et qu’ils apprécieraient d’avoir su ce « détail » à l’avance pour prévoir le coup, comme apporter son maillot de bain par exemple.

J’avais vu juste. Quand Benoit avait su que ce serait des douches dans un centre sportif et que les douches comme dans tout bon vestiaire seraient ouvertes, plusieurs avaient effectivement exprimé leur inconfort. Je pense qu’ils ont presque tous un maillot de bain dans leurs bagages, moi y compris.

Toutefois, en visitant les lieux je remarque qu’il y a plus d’un endroit disponible où l’on peut prendre notre douche dont une place au fond d’un couloir qui semble être une douche privée avec une porte qui se barre de l’intérieur. Je me promets d’y venir ce soir tard ou demain matin tôt. Quand nous montons à l’étage pour continuer notre visite, nous croisons Andrew et Annie qui sont arrivés en bus, de Skive et ont mis leurs bagages dans la tente à côté de la nôtre.

Les forfaits repas ne commencent qu’à partir de demain et tout le monde a très faim, nous décidons donc d’aller tous manger ensemble à Skive. En chemin, nous observons qu’il fait encore très clair pour l’heure qu’il est, à 19:30 hres chez-nous, il fait noir. Ça nous laisse plus de temps pour voir le paysage qui borde les petites routes de campagne, nous sommes passablement loin des grandes villes et on constate à quel point quand nous entrons dans Skive. Mais ce qui nous frappe le plus c’est l’absence de gens, peu de voiture, personne ou presque sur les trottoirs, tout est bien tranquille et donc très peu de restaurant ouvert. Pour moi c’est toujours surprenant, nous sommes vraiment un peuple qui aime beaucoup manger au restaurant, et ce n’est pas juste à Montréal, j’ai grandi en campagne entre deux villages dont un qui comptait plus d’une douzaine de restaurants en plus des trois-quatre bars.

On finit par en trouver un, et quand le serveur nous voit entrer il écarquille les yeux, nous sommes neuf personnes, je pense qu’on le prend un peu par surprise, il n’y a qu’un couple assis dans un coin. Nous lui demandons si nous pouvons y manger, il acquiesce, nous nous dépêchons de nous asseoir avant qu’il ne change d’idée. On plonge dans notre menu, moi et Ben avons un p’tit peu envie de brailler mais bon on garde ça entre nous, juste notre assiette principale avec une bière et un verre de vin va nous coûter aux alentours de 80$. Oui Benoit prend un steak, mais je prends tout de même juste une assiette de mini burgers avec frites. On se comprend sans même se parler : on évite les restaurants cette semaine et on va à l’épicerie!

Une couronne danoise équivaut à environ 0,21 cent canadien


Le souper s’anime autour de notre grande table à mesure que les verres se vident, mais nous ne voulons pas trop nous attarder, donc nous payons et quittons pour retourner à Spottrup. La pénombre est tombée mais pas complètement, il approche 22:00 hres et on voit encore des trous de clarté dans le ciel.

Sur place, nous croisons Julia qui nous invite à prendre le thé dans sa tente médiévale, elle a un petit poêle au gaz portable pour faire chauffer de l’eau. Elle est encore seule sur son campement qui n’est pas du même côté que celui de Magnus, demain il y aura d’autres marchands qui viendront s’ajouter. Mais ce soir, avec le vent, isolée des bâtiments, sa tente semble tragiquement seule, nous nous dépêchons de nous y engouffrer. Elle allume des chandelles et son p’tit poêle et nous prépare une bonne tasse de thé pour finir notre journée.  



lundi 12 février 2018

Printemps 2017: En attendant de partir au Danemark!



Le retour à Montréal, le 2 mars sous la neige avec un 20 degrés sous zéro a été presqu’un soulagement, nous sommes définitivement des enfants de l’hiver et du Saint-Laurent, pour paraphraser Alexandre Poulin. Et de toute manière, le froid est déjà moins mordant, le printemps se manifeste de temps en temps. L’arrivée du printemps signifie pour les combattants québécois la préparation pour le tournoi mondial, les achats de nouvelles pièces d’équipements et de vêtements médiévaux, de réparations de matériel et de motivation à s’entraîner davantage.

Le tournoi hivernal qui a lieu le 11 mars à Trois-Rivières, est une occasion de se revoir tous; ceux et celles qui feront partie de l’Ost cette année; ceux et celles qui pratiquent ce sport et qui cherchent une occasion de se mesurer aux autres; et finalement ceux et celles qui s’y intéressent de près ou de loin. Comme toujours, on accueille des Américains et des Canadiens de l’Ontario, ceux qui se battent au tournoi mondial compétiteur Battle of the nation. Depuis l’an dernier il y a aussi des Canadiens du Yukon, ceux qui participent à notre tournoi mondial IMCF.

C’est un tournoi décorum où en principe nous (les accompagnateurs et les combattants lorsqu’ils ne portent pas leur armure) devons être costumés, ce qui est plus ou moins respecté. Je commence sérieusement à me questionner sur la pertinence du costume obligatoire pour un tournoi qui a lieu dans un gymnase avec de la musique rock ou techno crachée dans les enceintes acoustiques. Je crois que la formule « médiévale » de ces petits tournois, n’a jamais été gagnante, la vingtaine, au maximum, trentaine de spectateurs chaque année est surtout composée de parents ou d’amis des combattant(e)s ou de pratiquants du dimanche. À mon avis, le costume doit aller avec le décorum, soit parce que c’est dans le cadre du tournoi mondial au château où l’on nous demande d’être en quelque sorte, un divertissant historique vivant ou bien dans le cadre d’un festival médiéval, voire les Highland games. Comme je l’ai abordé dans mon ouvrage anthropologique à propos de Bicolline, le costume est là pour la suspension volontaire de l’incrédulité, en d’autres mots c’est un support pour aider à rester dans l’enchantement de l’activité.

La magie médiévale n’opère pas pour ce tournoi, les individus dans leur tunique, houppelande, cottehardie, etc. semblent perdus dans ce décor qui n’a absolument rien à voir avec ce qu’ils portent. Malheureusement, je pense que c’est un peu ces dissonances qui sont ridiculisées parfois par les non-initiés aux activités qui tournent autour de ce thème.

Je pense que le béhourd a besoin de sortir de ce format dans lequel l’ont placé les reenacters. Aujourd’hui, beaucoup revendiquent ce sport et le maintiennent dans ce carcan, ce qui fait qu’il est souvent perçu comme du GN ou de la reconstitution historique par le public. Ainsi, il perd de la visibilité auprès des amateurs de sport de combats ou de sport d’équipe, du moins ceux qui se désintéressent de la culture médiévale. Les petits tournois comme le nôtre gagneraient à se présenter comme un tournoi sportif uniquement, en mettant de côté les costumes, ne laissant qu’aux combattant(e)s, leur uniforme : armure et gambisonnage. 

Je sais, en tant que costumière, je me tire un peu dans le pied en prenant position contre le costume dans certains tournois, après tout c’est mon gagne-pain actuellement. Mais c'est justement parce que je veux que mes robes, tuniques, houppelandes, braies et chausses soient des vêtements portés dans un cadre historique et non pas qu'ils aient l'air d'abord de costumes d’halloween.

La journée a lieu sans heurt et sans grand moment mémorable et comme l’an dernier, j’ai porté peu d’intérêt aux scores. Benoit n’a fait qu’arbitrer et pour moi, ce tournoi est plus un moment de rencontrer mes client(e)s. Un jour. peut-être, le tournoi hivernal au Québec sera plus enlevant.

Toutefois, pour Benoit c’est encore une petite victoire en tant que coach, car Christine lui a demandé son aide pour son pro fight contre Béné. Même si au final c’est Béné qui gagne, Christine s’est bien débrouillée parce que Benoit a réussi à lui faire briser certains blocages. Encore une fois, il prouve qu’être un bon coach c’est d’abord amener l’athlète à reconnaître ses forces et travailler avec. La victoire de Christine c’est d’avoir su identifier ses peurs et travailler avec ses forces, et celle de Benoit c’est contre les mauvaises langues.      

Le mois de mars apporte une bonne nouvelle, nous déménageons en juillet dans un grand cinq pièces! Je pourrai avoir une pièce pour mon atelier, Benoit aura son bureau pour son travail IMCF et son armure, ses armes et son stock d’entraînement. Les trois autres pièces ne seront pas encombrées par notre travail, en tout cas on va faire tout notre possible. Nous sommes super enthousiastes et conscients que, dès notre retour du Danemark, on fait les boîtes.

On attend toujours des nouvelles de l’Écosse, c’est long pour nos nerfs et Benoit aimerait pouvoir annoncer ce tournoi lors de la cérémonie de clôture à Spottrup dans deux mois, d'ici là, il reste tellement à faire. De mon côté j’ai plusieurs contrats depuis novembre, et les mois de mars et avril sont surchargés de commandes pour le Danemark et pour Bicolline, je donne un coup pour terminer quelques semaines avant notre départ, j’aime bien me libérer du temps pour nos propres vêtements et pièces de gambisons.

En train de faire une nouvelle paire de jambières à Ben

Ben qui fait des ajustements




Après une dernière tempête à la fin de mois de mars, le printemps s’installe définitivement dès le début d’avril. Comme Andrew a fini son mandat de deux ans en tant que capitaine de l’Ost, on doit s’en voter un nouveau ou une nouvelle pour cette année seulement, car il a été décidé que le mandat aurait maintenant une durée d’un an. Le capitaine sert l’Ost durant le tournoi uniquement tout simplement parce que l’entité de cette équipe n’existe que pour ce moment annuel. Il ou elle, a pour tâche d’assister aux réunions à tous les matins, voter sur les décisions au nom de l’Ost, transmettre les informations à son équipe et en gros, représenter les membres de son équipe auprès des arbitres lors des combats. Les trois personnes pressenties sont Andrew, de nouveau, Régis qui est représentant à l’international depuis que Benoit est devenu vice-président de l’IMCF, Béné notre championne médaillée d’or à l’épée longue depuis deux ans et Christine qui s’illustre par son implication constante depuis un an. Cette dernière en a fait beaucoup jusqu’à maintenant, autant d’un point de vue administratif, que pour aider les autres. Sa bonne humeur est aussi contagieuse et personne n’a oublié sa propension à prêter son matériel et à aider autrui au Portugal l’an dernier.



Andrew et Régis se désistant, le vote se reporte sur Béné ou Christine, le CA me demande si je peux m’occuper de récolter les votes secrets, parce que je suis dans une position de neutralité de non votante et même de non membre de la fédé. Chaque combattant et combattante qui fera partie de l’Ost, m’envoient leur vote par courriel et le dimanche venu, le choix est reporté sur Christine. Celle-ci est un peu nerveuse devant la tâche qui lui est incombée mais Andrew, Régis et Benoit lui assurent leur soutien si elle a besoin d’aide. Bien sûr, Benoit sera probablement débordé une fois là-bas, mais il assure qu’il ne sera jamais loin si elle a des questions ou inquiétudes.






Comme nous avons de nouveaux membres dans l’Ost, ils ont besoin de tabards, j’offre comme l’an dernier, mon aide et ma surjetteuse et Christine accepte que sa maison serve d’atelier. Nous sommes moins nombreux que l’an dernier, c’est un peu plus calme, mais ça demeure agréable comme activité de groupe, ça aide à maintenir une certaine cohésion au sein de l’Ost. Néanmoins, nous savons moi et Ben, qu’une fois là-bas nous serons peu disponibles pour être avec le groupe, spécialement lui qui sera fort occupé par les nombreuses tâches reliées à l’organisation en dehors de ses combats avec l’équipe.  

Une amie a dit un jour de moi que j’étais son amie « électron libre », je dois admettre qu’elle m’a bien cerné. J’aime faire des activités en groupe, mais en tournoi je préfère aller où bon me semble. Je préfère parfois me retrouver seule avec moi-même dans une foule, que de me sentir obligée de suivre un groupe. C’est peut-être parce que je n’aime pas beaucoup les conventions sociales, et je déteste avoir à me justifier envers un groupe. La seule obligation que je m’imposerai lors de ce tournoi, c’est de veiller à nourrir mon homme, sinon, lui ne le fera pas et à l’aider s’il a besoin de moi. Le reste du temps j’irai où mon instinct me mènera et serai ainsi toujours disponible à l’observation autour de moi. Oui je sais, je peux paraître égoïste, mais je m’assume et je ne garde pas rancune envers ceux ou celles que je suivrais si je n’étais pas moi, pour faire partie de la gang.

D’un autre côté je ne m’ennuie jamais avec Ben, puisque nos intérêts sont très similaires, ce n’est jamais l’un qui suit l’autre, mais une aventure qu’on vit ensemble. Et bien que nous adorions aller à la rencontre de l’Autre en terre étrangère nous nous accordons la liberté de voyager « ensemble en solitaire ». Ce que nous avons fait d’ailleurs au début avril, en allant passer quelques jours à Paris pour le plaisir de nous balader à pied autour de la Seine et de luncher dans un petit café parisien. Pour nous, ça représente à peu près le même prix que d’aller passer une fin de semaine à Charlevoix dans un Bed&Breakfast.

Coucou c'est nous!! Au Louvre


mercredi 7 février 2018

Férié à Buenos Aires





Avant de partir en voyage, la semaine précédent notre départ, nous avions prévu de : 1, d’arriver avec un jour d’avance pour visiter un peu Buenos Aires; 2, dormir une bonne nuit à l’hôtel avant de partir le lendemain soir à Embalse; 3, au retour de profiter de notre mardi pour continuer notre visite à Buenos Aires; 4, de suivre un mini cours de Tango comme il s’en donne parfois dans les rues; 5, de dormir une autre bonne nuit dans un Airbnb, et repartir le mercredi. Nous avions convenu que nous en trouverions un en naviguant sur Internet lors de notre séjour à Embalse. Comme nous l’avons vu précédemment, notre plan 1 et 2 sont tombés à l’eau à cause de la foutue tempête de neige à Toronto, nous verrons bien pour le reste. Notre séjour à Buenos Aires est escamoté de moitié, il n’était déjà pas très gros.

La veille, Caitlin nous a trouvé un petit appartement sur Airbnb, en plein cœur de la ville, nous y logerons tous les quatre, Steve a déjà loué une chambre d’hôtel depuis longtemps. Nous nous donnerons rendez-vous pour passer cette dernière journée ensemble, nous n’avons pas décidé encore ce que nous ferons, mais moi et Benoit avons bien l’intention de voir le cœur de la ville du tango.

Nous arrivons vers 9:00 et je devine à travers les vitres fumées, le soleil déjà brûlant et j’imagine l’humidité de la ville. L’autobus se stationne et ouvre ses portes, l’air chaud s’engouffre, lutte un instant avec l’air ambiant soufflé par la climatisation, je me résigne à sortir. Je n’irais pas jusqu’à dire que je fantasme en ce moment sur notre froid québécois de février, mais certainement sur la neige. Bon je finirai bien par m’adapter au courant de la journée, ouains, en tout cas…

Nous faisons nos adieux à nos nouveaux ami(e)s et entrons dans un Star Buck juste à côté parce qu’on a besoin de caféine et qu’on veut du WI-FI pour trouver comment nous rendre à notre appartement loué. N’oublions pas que nous sommes encore chargés comme des mulets, on empile tout notre stock qui fait figure de montagne à côté de notre table, nous doutons fort de pouvoir monter tous dans le même taxi. Après notre café et notre « pof » d’air clim, nous sortons dans l’espoir de trouver un véhicule… ou deux, après que Steve ait pris lui-même un taxi pour son hôtel. Il viendra nous rejoindre après avoir déposé sa valise. Finalement, c’est deux taxis qui viennent rapidement à notre rescousse, disons que nous sommes visibles comme le nez au milieu du visage avec notre tas de bagages au milieu du trottoir. Notre monsieur super gentil ignorait certainement le poids des sacs avant d'entreprendre de les mettre lui-même dans son véhicule. C’est toujours drôle de lire la surprise dans les yeux des chauffeurs de taxi quand ils soulèvent les sacs d'armure. On  leur explique bien sûr et c'est une bonne occasion de faire connaître cette activité, c'est aussi un super sujet de conversation pour meubler les silences durant le trajet.

Nous roulons une quinzaine de minutes, le quartier que nous traversons me rappelle un peu St-Henri à Montréal avant qu’il ne devienne à la mode, c’est un quartier ouvrier, chargé d’histoire et où l’on détecte ici et là pas mal de pauvreté. Je reste sans voix à la vue d’une petite famille qui semble vivre carrément en plein air dans la rue, sous un pont contre lequel est installé un vieux divan, où s’entassent une partie du groupe. La mère (j’imagine que c’est elle) étend des vêtements sur une corde entre deux arbres pour les faire sécher, pendant que deux jeunes enfants, pieds nus, tournent autour. J’ai toujours trouvé que la pauvreté en ville semblait pire que la pauvreté en milieu rural, même si la pauvreté c'est triste partout.

Puis nous passons dans un quartier qui me rappelle le Plateau Mont-Royal, celui des artistes avant qu’il soit embourgeoisé. C’est ici que nous logeons. Après être descendus de voiture, sorti nos valises et payé respectivement les deux chauffeurs, nous frappons à la porte, pas de réponse, sauf une grosse tête de berger allemand qui apparaît à une fenêtre ouverte. Non seulement, il n’est pas du tout menaçant (je crois depuis toujours que les gros chiens sont les moins dangereux) mais en plus, il a l’air content de recevoir de la visite.



Nous sonnons et frappons à la porte, convaincus que le chien se mettra à aboyer et alertera sa maîtresse, non, il nous regarde tout bonnement et semble attendre d’être caressé, ce que je m’empresse de faire. Caitlin envisage de contacter la propriétaire, nous scrutons un peu autour pour trouver un endroit offrant du WI-FI. Nous bloquons tout le trottoir. Un moment je regarde à l’intérieur et je crois voir deux personnes debout au fond de la maison en train de parler, ils ne peuvent pas, ne pas nous entendre. Ça doit bien faire une quinzaine de minutes que nous poirotons devant sa porte, jusqu’à ce qu’elle se décide de venir ouvrir pour laisser sortir son invitée et nous laisser entrer, sans donner aucune explication. Faut dire qu’elle ne parle pratiquement ni anglais ni français, et nous ne parlons pas espagnol, donc, on se limite à l’essentiel. Évidemment le chien vient nous accueillir, j’imagine qu’il n’est pas très jeune, le manque d’excitation le trahit, mais bon ça doit être difficile d’être fringant et pétillant dans une telle chaleur.


L’annonce disait que l’endroit était climatisé pourtant, je commence sérieusement à mettre en doute l’efficacité des climatiseurs en Argentine. L’endroit est tout de même plus confortable qu'à l’extérieur, mais c’est surtout parce que c’est bien aéré et que la terrasse derrière est complètement recouverte de végétaux. C’est tout simplement magnifique comme petite maison urbaine, je n’ai pas assez de yeux pour me délecter de ce qui me semble, un véritable musée privé.












Nous faisons le tour et choisissons chacun notre chambre, il y en a quatre, Ben et moi choisissons celle du haut, Ben a repéré un air climatisé à l’intérieur. La dame nous explique que ses appartements privés sont juste dans l’autre moitié de la maison, un salon double comme on en retrouve dans les vieux appartements à Montréal. Par la porte entrouverte, je découvre un grand piano à queue et encore plein de toiles sur les murs, tout est tellement beau! Un appartement d’artiste!

Nous nous dépêchons de nous changer et de nous installer, Caitlin tente de rejoindre Steve via Facebook, c’est sûr qu’il a du WI-FI à son hôtel. Sans succès, il n’est pas en ligne et ne l’a pas été depuis la veille, pourtant il doit être arrivé depuis un bout de temps déjà. Nous décidons de sortir pour aller manger nous n’avons pas encore pris de véritable repas depuis la veille, sûrement que nous réussirons à le joindre d’ici là. Ce que nous n’avions pas encore réalisé, c’est qu’hier et aujourd’hui sont des journées fériées, jours de carnaval! Nous le savions pourtant, mais nous l’avons oublié durant le tournoi. Tout est fermé ou presque! C’est désert, presque aucun piéton, une circulation automobile très fluide, et tous les commerces que nous croisons sont fermés puis au coin de la rue…STEVE! Un Steve suant à grosses gouttes, trainant sa valise et qui pleure quasiment de bonheur quand il nous aperçoit. Le chauffeur de taxi s’est trompé et ne l’a pas conduit au bon endroit et Steve s’est retrouvé seul au monde, sans hôtel autour, sans WI-FI, sans savoir où nous étions exactement. Il a déambulé une grosse heure avec un sentiment de panique, sous le soleil, par chance, c’est tellement désert, qu’il nous a repéré vite! Nous lui offrons de venir au Airbnb, il y a déjà une chambre de libre pour lui.

Sur notre retour, nous repérons une petite épicerie, nous décidons de nous y arrêter pour trouver de quoi manger et boire. Nous ramassons ce que nous pouvons pour un petit gueuleton en groupe que nous prendrons sur la terrasse. Nous espérons trouver un restaurant ouvert ce soir, nous ne savons pas ce qui est fermé parce que c’est férié ou juste parce que c’est l’après-midi et que c’est la siesta d’une certaine manière. Pour avoir été en Espagne, au Mexique, au Portugal et maintenant en Argentine, nous commençons à comprendre qu'en après-midi, au plus fort de la chaleur, on s’arrête ou du moins on ralentit le rythme. En fait c’est tout le contraire de chez-nous où c’est le moment le plus achalandé dans les magasins, les ventes trottoirs ou les activités à l’extérieur. C’est une réalité propre aux pays nordiques et tempérés je crois.

Notre hôte n’a aucun problème à accepter un logeur supplémentaire et l’invite à s’installer dans la dernière chambre pendant que nous préparons notre repas. La terrasse nous appelle, c’est une véritable oasis en ce jour de canicule, nous laissons définitivement tomber l’idée d’aller nous promener en ville, du moins jusqu’au souper.




En fin d’après-midi, Martina communique avec nous pour savoir si nous aimerions aller manger dans un bon restaurant avec elle ainsi que Carolina et Hugo. BIEN SÛR !! On se donne rendez-vous, c’est à une quinzaine de minutes à pied, en attendant nous prenons l’apéro, « tranquilos », pendant qu’à tour de rôle on va se rafraîchir sous la douche. La propriétaire vient nous demander si ça nous dérange si elle joue du piano dans la pièce d’à côté, car voyez-vous, c’est une pianiste de concert et elle en a justement un spectacle la semaine prochaine, elle doit pratiquer.





En chemin pour le restaurant, nous constatons que la ville semble s’éveiller un peu à mesure que la nuit tombe. L’air est encore chaud et humide, mais le soleil en moins, c’est plus confortable. Nous retrouvons avec bonheur nos ami(e)s, au coin de la rue à deux minutes de notre restaurant. L’endroit est tout ouvert et l’on y sert des grillades, ça m’a l’air d’un bon resto avec des prix un peu plus chers que ce que nous avions envisagé (nous sommes toujours un peu cassés en fin de voyage) mais tout de même raisonnables. La soirée est fort agréable, la bouffe est délicieuse, le vin est bon, les conversations autour de la table sont enrichissantes, tous nos nouveaux ami(e)s vont nous manquer : Martina, Carolina, Mariano, Verona, Chito, Hugo, Mariana, Maite, Milca, Roberto, Augusta et tous les autres que j’oublie malheureusement parce que je les ai moins côtoyés. Les discussions à propos d’anthropologie et d’histoire de l’Argentine avec Hugo, m’ont complètement allumées, nous allons devoir y revenir, absolument. Lui et Mariana, sa copine, nous invitent à venir les visiter avec plaisir, ils pourront nous montrer du pays. Nous avons hâte aussi de goûter l’hydromel aux piments qu’il nous a offert, un alcool venant de sa nouvelle entreprise.


Comme toute bonne chose a une fin, nous nous quittons avec des promesses d’au revoir et nous retournons prendre un dernier verre sur notre terrasse d’une nuit, avant d’aller dormir. 


Une fois là-haut dans notre « chambre-fournaise », Benoit s’empresse de faire fonctionner le vieil air climatisé pour que nous puissions dormir. Étendus tous les deux sur le dos, petit doigt contre petit doigt, en attendant désespérément un tout petit peu de fraîcheur, nous sombrons dans le sommeil. Nous sommes réveillés au milieu de la nuit par les bruits de la rue sous notre fenêtre et d’eau qui coule…Y a une flaque d’eau par terre, sous le climatiseur, on met rapidement nos serviettes de douche pour ramasser le dégât, éteindre l’appareil et se recoucher. Finalement, je n’aurai pas passé ma journée à visiter Buenos Aires, ni n’aurai fait du tango, et ma nuit confortable est pas mal…à l’eau! Tout de même je ne regrette rien, comme toujours, nous revenons enchantés de ce voyage éclair, parce qu’une fois de plus nous avons fait des belles rencontres dans le cadre de notre passion commune : l’univers du béhourd. Oui la planète regorge de lieux magnifiques et insolites, d’endroits à découvrir, différents de chez-nous, mais notre principale motivation lorsque nous « couraillons » à travers le monde, c’est d’aller à la rencontre de l’Autre, c’est je crois, la meilleure façon de voyager.

La fenêtre de notre chambre, aucune vitre, que des volets extérieurs.

Trois petites madames péruviennes ou chiliennes à l'aéroport. 




dimanche 4 février 2018

«Jamais deux (tournois sous l'orage) sans trois!»



Une longue journée nous attend aujourd’hui : Les finales, la remise des trophées et des médailles et notre départ en soirée. Comme nous prévoyons un souper de groupe au restaurant avant de partir, nous devons organiser nos bagages tout de suite, de sorte qu’ils soient déjà à bord lorsque nous partirons après notre repas. Les armures devront être rapidement mis à bord après le tournoi, directement à partir des vestiaires sous les estrades. Je m’affaire donc à trier ce qu’on met tout de suite dans nos valises et ce que je vais traîner dans mon sac qui m’accompagne partout. Pendant ce temps, Benoit fait un yoga avec Steve, Andrew n’a pas suivi cette fois, c’est certainement pas moi qui vais le juger.

Peu après, nous descendons avaler un café en vitesse et puis direction tournoi où le soleil est déjà plombant. Il est 10:30 et personne n’est armuré alors que le tournoi devait débuter, en principe, à 8:30, depuis le début du tournoi, rien ne fonctionne comme prévu. C’est tout de même une nouvelle expérience, c’est notre premier tournoi Open de l’IMCF, mais d’un point de vue humain, c’est tout simplement génial. Désormais nous sommes fixés, nous savons ce qu’on doit faire et ne pas faire, comme par exemple, éviter les tournois en plein été en Amérique du Sud. Aussi c’est toujours préférable de concentrer la majeure partie des combats, le soir pour s’assurer une présence du public, donc ça veut aussi dire avoir un emplacement équipé en conséquence.

Aujourd’hui, Benoit et Andrew ne combattent pas, ils arbitrent les finales, ils en sont bien heureux d’ailleurs, vu la température. Hier, même les Mexicains se plaignaient de la chaleur. Pour ma part je reste à l’ombre sous le toit de l’estrade en béton, seul endroit supportable, je n’ai absolument pas envie de partir en exploration. De toute façon je ne manque pas de compagnie, y en a toujours qui viennent y prendre un peu de répit. Verona (Georgina), bien qu’elle-même Argentine, supporte difficilement cette météo, nous passons donc, pas mal de temps à bavarder au « frais ». Tout comme moi, elle fait aussi des costumes et m’avoue avoir de la difficulté à trouver des tissus à prix abordables ici. Le matériel est souvent une source de soucis pour les gens du milieu du béhourd, et si c’est le cas au Québec, ça semble pire en Amérique du sud. D’abord parce qu’actuellement le pays traverse une crise économique; ensuite les lainages, largement utilisés dans la confection de vêtements médiévaux, de tabards et pour certaines armures, sont rares et chers dans les pays chauds; et finalement comme partout en Amérique, le béhourd en est à ses premiers balbutiements, donc on trouve peu de fournisseurs sur place.

Un autobus arrive et déverse un flot de visiteurs, en fait, ce sont les personnes âgées qui séjournent à notre hôtel, nous sommes un peu surpris, ce n’est pas le public habituel. Nous les regardons un peu déambuler autour, jusqu’à ce qu’une dame, accompagnée de ses amies, nous voit, moi et Verona en train de bavarder ensemble. Elle demande en espagnol à Verona si elle peut prendre une photo de nous deux, nous acceptons, puis, elle et nous, puis ses amies et nous, puis elle et ses amies avec nous. En un instant nous nous retrouvons telles des stars prisonnières des appareils photos, Benoit arrive et est pris lui aussi dans le tourbillon, recevant même, malgré lui, un bec sur la bouche d’une admiratrice. Pourtant, ces gens nous voient depuis trois jours, mais sans jamais oser nous demander quoi que ce soit, il a suffi d’une dame un peu plus téméraire et voilà la grosse séance de photo générale. Je voudrais bien leur rappeler que le vrai show, il est dans la lice, mais à quoi bon? Je l’ai compris depuis longtemps, pour la majorité des femmes, les belles robes médiévales c’est plus vendeur que des combats de chevaliers.

Peu à peu, le mouvement s’estompe et après nous avoir remercié à profusion, le groupe regagne leur autobus, peut-être s’en retournent-ils à l’hôtel pour la siesta?

Les combats s’achèvent, mais juste avant que les deux dernières équipes ne s’affrontent en finale, le ciel s’obscurcit soudainement. Néanmoins, on se dit que nous aurons le temps de finir avant que ça nous tombe dessus et de toute façon, la plupart d’entre nous se souviennent de l’orage à Malbork (Pologne), les combattants avaient continué leurs rounds et faut l’admettre, ça avait donné des photos magnifiquement épiques. L’année précédente, nous avons eu aussi un gros orage au Portugal, mais il y avait tellement de vent, que nous avions dû suspendre le tournoi pour un bon deux heures.


Le ciel devient tellement noir, que le doute s’installe rapidement, quand la pluie se déverse en torrent, la majorité des gens court se mettre à l’abri, celui où j’ai élu domicile depuis ce matin. Les finalistes semblent vouloir continuer quand même. À Malbork, nous avions joué avec le feu, il aurait pu arriver un malheur, les combattants ont pris un risque d’être frappé par la foudre dans leur armure. C’est un risque que Benoit ne veut pas prendre, et comme c’est à lui que revient la décision finale, il arrête tout, et tout le monde se retrouve sous les estrades à contempler le ciel.




Comme toujours, plus c’est violent, moins ça dure longtemps, c’est pourquoi, aussitôt l’éclaircie revenue, les deux équipes se pressent de poursuivre leur combat final qui est remporté par l’une des équipes argentines le CECM ( Centro de Entrenamiento de Combate Medieval).




Le CECM

À ce jour, ce sont les plus beaux trophées que j'ai vu à l'IMCF


Caitlin a revendiqué le trophée restant

Elle a fait bien sûr des envieux!!!

Immédiatement après, sans cérémonie, nous procédons à la remise des médailles et des trophées, nous disposons de peu de temps puisque notre autobus doit partir à 23:00 hres et qu’il est 18:00 hres. Ce n’est pas tant la remise des médailles en elle-même qui prend du temps, mais encore une fois cette période post tournoi qui s’étire toujours peu importe où nous nous trouvons. Les prises de photos, les échanges de coordonnées, les discussions à propos du tournoi, tout pour étirer le plus longtemps possible ce moment d’échange culturel entre passionnés du béhourd. Une chance qu’il reste quelques personnes raisonnables pour rappeler aux autres, que nous avons un long voyage d’autobus à faire et qu’il faut donc, ramasser les armures et bagages pour les mettre dans l’autobus et surtout nous devons manger. 




Dans les vestiaires, tout le monde ramasse leurs stocks d’armes et d’armure pour les embarquer dans les véhicules qui ramèneront tout le monde soit à l’aéroport de Cordoba, j’ignore si certains sont venus en voiture, mais si c’est le cas, ils ont une longue route devant eux. En ce qui nous concerne, nous reprenons le même transport qu’à l’aller, donc notre gros autobus CLIMATISÉ pour Buenos Aires. Ce matin nous avions apporté tous nos bagages dans le vestiaire pour sauver du temps ce soir, nous les déposons avec les armures d’Andrew et de Ben dans la soute puis partons avec Martina en voiture pour aller manger au village. La nuit est tombée depuis une bonne heure, mais les restaurants sont pleins, à cette heure, les terrasses ne peuvent accueillir plus de deux ou trois personnes à la fois, alors que nous sommes une dizaine de personnes qui prévoyaient manger ensemble. Nous finissons par trouver une pizzéria qui peut nous prendre à l’intérieur. En principe, il y a de l’air climatisé, mais moi, Benoit et Andrew, le ressentons à peine. Nous sommes trop habitués, chez-nous, à nos climatiseurs puissants dès que nous mettons le pied à l’intérieur d’un bâtiment public ou d’un commerce et dans certainement la moitié des maisons québécoises lorsqu’arrive l’été. Nos maisons sont construites pour être bien isolées du froid, et nous ne sommes vraiment pas conditionnés à une telle chaleur, même si nous avons aussi des canicules durant l’été.

Pour ce qui est du menu, nous avons de la chance, il y a toujours du steak et du vin rouge à des prix abordables pour Benoit. Point de vue culinaire, nous avons découvert le chimichurri, un condiment à base de persil, de coriandre, d’origan, d’ail, d’oignon vert et de piment. Il accompagne parfaitement le bœuf, particulièrement les steaks.

Le service est si long, que nous devons manger notre repas en quatrième vitesse et faire rapidement nos adieux à Martina et à ceux et celles qui ne prennent pas le bus avec nous. Celui-ci est déjà dans le stationnement, tous ses passagers à bord n’attendent que nous, nous laissons donc tomber l’idée d’aller acheter de quoi grignoter et boire pour la route et nous y engouffrons pour la nuit.   

Graffiti dans les toilettes de l'hôtel ;-)