Cette nuit je n’ai pas entendu de
tonnerre, j’ignore s’il y en a eu, ou peut-être parce que je ronflais trop
profondément selon les propos de Benoit et de nos voisins de tente, je garde
quand même quelques réserves là-dessus. Une chose est sûre, j’ai bien dormi
dans mon sac de couchage et collée sur mon chum, mais y en a plusieurs qui
prévoient aller s’acheter des couvertures aujourd’hui parce qu’ils ont eu froid.
La cantine est remplie à pleine capacité,
le forfait repas était vraiment une bonne idée finalement. Benoit se débrouille
pour manger, il s’est acheté du gruau instantané, avec des fruits, des œufs
cuits durs et bien sûr un café il devrait survivre. Évidemment il va passer une
bonne partie de sa journée dans la salle de conférence et m’invite à le joindre
si le cœur m’en dit. Je ne dis pas non, car je n’ai pas vraiment envie de
suivre le groupe de Québécois qui s’en vont visiter des ruines vikings
aujourd’hui, pas que je ne veux pas être avec eux, mais pour moi, suivre un
groupe signifie une perte de liberté de quitter quand j’en ai envie. De toute
façon, nous irons probablement les visiter lundi sur notre chemin du retour.
Parlant de liberté, je la goûte à fond, je
me promène, j’erre où mes pieds me portent, c’est le calme avant la foule de
spectateurs demain. Pour rendre ma ballade encore plus agréable, la température
est idéale, nous avons du soleil du matin au soir sans qu’il fasse trop chaud.
On espère que ça se poursuivra pendant tout le tournoi, du moins, pour
l’absence de précipitation. Je fais le tour des marchands autour du musée et
trouve le comptoir de Peter, le Danois, célèbre pour ses bouteilles d’hydromel,
qu’il vend comme des p’tits pains chauds à tous les tournois. Et parce qu’elles
partent vite, j’achète tout de suite une bouteille d’hydromel aux noisettes,
que je ramènerai dans mes bagages.
On m'a dit que le gros réservoir servait de bain, mais j'admets que je n'ai pas tant enquêter à ce sujet. |
Le médiéval au Danemark est plus viking parce que ça réflète beaucoup plus leurs racines. |
De retour au Centre, je retrouve Hubert
(président de l’IMCF), sa femme Marta et leur fiston Adam. J’ai droit à de
chaleureuses accolades et j’en suis un peu surprise parce que nous nous sommes
parlé juste l’an dernier au Portugal, mais il est vrai qu’il est très présent
dans nos vies via messenger. Lui et
Benoit se parlent pratiquement tous les jours depuis plus d’un an, même avant
qu’il ne soit élu vice-président. Ils sont devenus de très bons amis, donc moi
aussi par extension et parce que je suis aussi très impliquée de mon côté. Ça
me fait drôle de les voir habillés en civil, pour moi, c’est beaucoup plus
habituel de le voir vêtu de sa cottehardie et de son chapeau médiéval, si lui
ne me connait que depuis l’an dernier, moi je le connais depuis quatre ans
puisqu’il est le président depuis le premier tournoi IMCF en Espagne à
Belmonte. Il est indissociable des cérémonies d’ouverture et de clôture.
Après ces agréables retrouvailles,
j’indique où est Benoit à Hubert, en ajoutant qu’il sera doublement heureux de
le retrouver son ami ET son associé. De mon côté je vais manger à la cantine
avec Cloé, Andrew et Annie, heureusement, la plupart des gens ont déjà mangé,
nous avons donc de la place pour nous asseoir à l’intérieur. On profite du
Wi-fi pour consulter nos messages et notre groupe Danemark 2017, dont sont
membres, tous les Québécois qui font partie du voyage. Il y a un message de
Gabrielle, elle est arrivée avec son chum Dan et Christine, et ils ont besoin
d’aide pour monter le campement avec les Belges qui nous prêtent gentiment une
tente sur leur campement, ce n’est pas pour y dormir mais plutôt pour y mettre
les armures et se reposer, c’est un peu notre quartier général. Sauf que là
nous sommes en train de manger et que tous les autres Québécois sont partis en
touristes, donc personne disponible dans l’immédiat. Nous les informons qu’ils
ont jusqu’à 15:00 pour diner, après il sera trop tard. On se dit qu’en
attendant juste une petite heure, il y aura pas mal plus de monde pour aider et
tout le monde aura mangé. Mais finalement, ils finissent de tout monter avec
les Belges en maugréant. Il est vrai que les Québécois auraient dû être tous là
pour aider à monter le campement, particulièrement la tente qui leur était
prêtée.
Vers la fin d’après-midi, je vais
retrouver Benoit, en espérant le kidnapper une petite heure, mais quand je le
vois discuter avec Magnus et Julia, je me fais plutôt un café et vais m’asseoir
avec eux. Je suis consciente que tout doit être prêt demain matin, en fait,
dans quelques heures quand le musée fermera. De toute façon, nous devons aller
chercher Dave, un des commentateurs, à l’aéroport. Lui et Benoit bavardent
depuis quelques mois sur facebook, depuis que l’équipe écossaise a été mis au
parfum concernant la tenue du tournoi à Scone. La sympathie mutuelle s’étant
développée le plus naturellement du monde dès qu’il fut s’agit de politique. En
effet, Dave est un indépendantiste aussi convaincu que nous et par la force des
choses, nous partageons beaucoup de points en commun. J’imagine que les conversations
vont être animées sur notre retour!
Plus tard, nous allons rejoindre le groupe,
maintenant complet, au Centre. Christine est un peu nerveuse, elle prend son rôle
de capitaine au sérieux, mais dans l’ensemble l’atmosphère est à la bonne
humeur. Comme le plus naturellement du monde, les Belges se joignent à nous, et
on est contents, on les aime bien nos ami(e)s. Faut dire que depuis Malbork en
Pologne, nous sommes presqu’une famille à force de partager nos campements,
sans oublier le tournoi à Galway l’automne dernier où nous (Ben, Andrew, Cloé
et moi) avons revu, Gauthier, Julie, Pol et Fred. D’ailleurs j’ai dans mes bagages,
une bière triple au sirop d’érable que je vais échanger avec Gauthier contre un
Dessert 58 (chocolat goûté lors d’un voyage en Belgique il y a une dizaine d’année).
Nous avons observé que chaque année, les
participants apportent de l’alcool et se font des échanges entre eux, c’est
pourquoi, Benoit après discussion avec Jacob a proposé d’en faire un événement
ouvert à tous et qui pourrait devenir une tradition : le « liquid cultural exchange ». Ça consiste à
apporter un alcool typiquement de son pays et le partager avec les autres. Pour
des raisons évidentes, il se tiendra le dimanche soir, après le tournoi. Je
trouve l’idée géniale et je ne suis pas la seule, l’enthousiasme semble avoir
gagné pas mal de monde. Dans notre groupe certains ont apporté du caribou, du
sortilège, du vin de glace, du gin et du rhum de chez-nous.
Après notre souper, pris en groupe dans la
salle au rez-de-chaussée, nous laissons le reste du groupe occupé à raconter
leurs visites touristiques et à regarder les photos prises à Legoland hier et
aux ruines vikings aujourd’hui. Il y aura un « breefing » plus tard en soirée avec
toute l’équipe mais Benoit ne pourra y être, il avait avisé d’avance qu’il
devait aller chercher notre commentateur numéro 1. Il aurait aimé qu’on fasse
cette rencontre à un autre moment donné pour pouvoir y assister, mais il
semblerait que sa demande s’est perdue au profit des visites touristiques.
Nous nous retrouvons sur la route,
toujours les feuille de mon itinéraire google map en main, c’est pas encore
clair dans notre tête même si nous y sommes allés hier. Le paysage ne change
pas beaucoup, les noms se ressemblent et avec les ronds-points partout c’est
facile de se tromper de voie. Néanmoins nous atteignons l’aéroport sans nous
tromper et récupérons Dave que je rencontre aussi pour la première fois. Normalement
il se bat dans l’équipe écossaise mais une blessure l’a obligé à s’arrêter temporairement,
c’est pourquoi, il ne vient qu’en tant que commentateur et qu’il n’a qu’un pack
sac avec lui. C’est un type sanguin comme Benoit, la conversation est très
animée et constante, j’essaie désespérément de comprendre, par chance Benoit me
traduit tout ce qu’il peut et surtout quand ça touche mes intérêts. Cependant,
comme je comprends à peu près tout ce que Ben dit car je suis habituée de l’entendre
parler en anglais, ça me permet de deviner ce qu’ils se disent.
Je pense que lorsque Benoit accompagnera
Dave dans la tour, ils formeront un duo de commentateurs super efficace. C’est
une tâche qui sera partagée aussi avec Brendan et Dale qui ont fait un
excellent travail l’an dernier et s’ajoute aussi Adam, chez qui nous sommes
allés en Allemagne avant le tournoi en Pologne. Les commentateurs sont tous
aussi des combattants ou du moins, l’ont déjà été, ce qui signifie qu’ils
connaissent ce sport intrinsèquement et sont en mesure de faire des analyses,
des commentaires et parler des athlètes dans la lice, qu’ils connaissent bien
souvent. Et cette année, nous aurons un Écossais, un Irlandais, un Américain,
un Allemand d’origine polonaise et un Québécois qui commenteront au fil du
tournoi. Toute cette brochette d’accents reflète bien la multitude culturelle
de l’événement. En ce qui me concerne, je crois bien que c’est cette rencontre
multiculturelle qui m’intéresse le plus dans cette grande aventure que nous
vivons depuis cinq ans. C’est aussi cette fascination de la nature humaine qui
fait de moi une anthropologue.