vendredi 16 mars 2018

En attendant le jour J.




Cette nuit je n’ai pas entendu de tonnerre, j’ignore s’il y en a eu, ou peut-être parce que je ronflais trop profondément selon les propos de Benoit et de nos voisins de tente, je garde quand même quelques réserves là-dessus. Une chose est sûre, j’ai bien dormi dans mon sac de couchage et collée sur mon chum, mais y en a plusieurs qui prévoient aller s’acheter des couvertures aujourd’hui parce qu’ils ont eu froid.

La cantine est remplie à pleine capacité, le forfait repas était vraiment une bonne idée finalement. Benoit se débrouille pour manger, il s’est acheté du gruau instantané, avec des fruits, des œufs cuits durs et bien sûr un café il devrait survivre. Évidemment il va passer une bonne partie de sa journée dans la salle de conférence et m’invite à le joindre si le cœur m’en dit. Je ne dis pas non, car je n’ai pas vraiment envie de suivre le groupe de Québécois qui s’en vont visiter des ruines vikings aujourd’hui, pas que je ne veux pas être avec eux, mais pour moi, suivre un groupe signifie une perte de liberté de quitter quand j’en ai envie. De toute façon, nous irons probablement les visiter lundi sur notre chemin du retour.

Parlant de liberté, je la goûte à fond, je me promène, j’erre où mes pieds me portent, c’est le calme avant la foule de spectateurs demain. Pour rendre ma ballade encore plus agréable, la température est idéale, nous avons du soleil du matin au soir sans qu’il fasse trop chaud. On espère que ça se poursuivra pendant tout le tournoi, du moins, pour l’absence de précipitation. Je fais le tour des marchands autour du musée et trouve le comptoir de Peter, le Danois, célèbre pour ses bouteilles d’hydromel, qu’il vend comme des p’tits pains chauds à tous les tournois. Et parce qu’elles partent vite, j’achète tout de suite une bouteille d’hydromel aux noisettes, que je ramènerai dans mes bagages.


On m'a dit que le gros réservoir servait de bain, mais j'admets que je n'ai pas tant enquêter à ce sujet.




Le médiéval au Danemark est plus viking parce que ça réflète beaucoup plus leurs racines.


De retour au Centre, je retrouve Hubert (président de l’IMCF), sa femme Marta et leur fiston Adam. J’ai droit à de chaleureuses accolades et j’en suis un peu surprise parce que nous nous sommes parlé juste l’an dernier au Portugal, mais il est vrai qu’il est très présent dans nos vies via messenger. Lui et Benoit se parlent pratiquement tous les jours depuis plus d’un an, même avant qu’il ne soit élu vice-président. Ils sont devenus de très bons amis, donc moi aussi par extension et parce que je suis aussi très impliquée de mon côté. Ça me fait drôle de les voir habillés en civil, pour moi, c’est beaucoup plus habituel de le voir vêtu de sa cottehardie et de son chapeau médiéval, si lui ne me connait que depuis l’an dernier, moi je le connais depuis quatre ans puisqu’il est le président depuis le premier tournoi IMCF en Espagne à Belmonte. Il est indissociable des cérémonies d’ouverture et de clôture.

Après ces agréables retrouvailles, j’indique où est Benoit à Hubert, en ajoutant qu’il sera doublement heureux de le retrouver son ami ET son associé. De mon côté je vais manger à la cantine avec Cloé, Andrew et Annie, heureusement, la plupart des gens ont déjà mangé, nous avons donc de la place pour nous asseoir à l’intérieur. On profite du Wi-fi pour consulter nos messages et notre groupe Danemark 2017, dont sont membres, tous les Québécois qui font partie du voyage. Il y a un message de Gabrielle, elle est arrivée avec son chum Dan et Christine, et ils ont besoin d’aide pour monter le campement avec les Belges qui nous prêtent gentiment une tente sur leur campement, ce n’est pas pour y dormir mais plutôt pour y mettre les armures et se reposer, c’est un peu notre quartier général. Sauf que là nous sommes en train de manger et que tous les autres Québécois sont partis en touristes, donc personne disponible dans l’immédiat. Nous les informons qu’ils ont jusqu’à 15:00 pour diner, après il sera trop tard. On se dit qu’en attendant juste une petite heure, il y aura pas mal plus de monde pour aider et tout le monde aura mangé. Mais finalement, ils finissent de tout monter avec les Belges en maugréant. Il est vrai que les Québécois auraient dû être tous là pour aider à monter le campement, particulièrement la tente qui leur était prêtée.


Vers la fin d’après-midi, je vais retrouver Benoit, en espérant le kidnapper une petite heure, mais quand je le vois discuter avec Magnus et Julia, je me fais plutôt un café et vais m’asseoir avec eux. Je suis consciente que tout doit être prêt demain matin, en fait, dans quelques heures quand le musée fermera. De toute façon, nous devons aller chercher Dave, un des commentateurs, à l’aéroport. Lui et Benoit bavardent depuis quelques mois sur facebook, depuis que l’équipe écossaise a été mis au parfum concernant la tenue du tournoi à Scone. La sympathie mutuelle s’étant développée le plus naturellement du monde dès qu’il fut s’agit de politique. En effet, Dave est un indépendantiste aussi convaincu que nous et par la force des choses, nous partageons beaucoup de points en commun. J’imagine que les conversations vont être animées sur notre retour!

Plus tard, nous allons rejoindre le groupe, maintenant complet, au Centre. Christine est un peu nerveuse, elle prend son rôle de capitaine au sérieux, mais dans l’ensemble l’atmosphère est à la bonne humeur. Comme le plus naturellement du monde, les Belges se joignent à nous, et on est contents, on les aime bien nos ami(e)s. Faut dire que depuis Malbork en Pologne, nous sommes presqu’une famille à force de partager nos campements, sans oublier le tournoi à Galway l’automne dernier où nous (Ben, Andrew, Cloé et moi) avons revu, Gauthier, Julie, Pol et Fred. D’ailleurs j’ai dans mes bagages, une bière triple au sirop d’érable que je vais échanger avec Gauthier contre un Dessert 58 (chocolat goûté lors d’un voyage en Belgique il y a une dizaine d’année).

Nous avons observé que chaque année, les participants apportent de l’alcool et se font des échanges entre eux, c’est pourquoi, Benoit après discussion avec Jacob a proposé d’en faire un événement ouvert à tous et qui pourrait devenir une tradition :  le « liquid cultural exchange ». Ça consiste à apporter un alcool typiquement de son pays et le partager avec les autres. Pour des raisons évidentes, il se tiendra le dimanche soir, après le tournoi. Je trouve l’idée géniale et je ne suis pas la seule, l’enthousiasme semble avoir gagné pas mal de monde. Dans notre groupe certains ont apporté du caribou, du sortilège, du vin de glace, du gin et du rhum de chez-nous.

Après notre souper, pris en groupe dans la salle au rez-de-chaussée, nous laissons le reste du groupe occupé à raconter leurs visites touristiques et à regarder les photos prises à Legoland hier et aux ruines vikings aujourd’hui. Il y aura un « breefing » plus tard en soirée avec toute l’équipe mais Benoit ne pourra y être, il avait avisé d’avance qu’il devait aller chercher notre commentateur numéro 1. Il aurait aimé qu’on fasse cette rencontre à un autre moment donné pour pouvoir y assister, mais il semblerait que sa demande s’est perdue au profit des visites touristiques.

Nous nous retrouvons sur la route, toujours les feuille de mon itinéraire google map en main, c’est pas encore clair dans notre tête même si nous y sommes allés hier. Le paysage ne change pas beaucoup, les noms se ressemblent et avec les ronds-points partout c’est facile de se tromper de voie. Néanmoins nous atteignons l’aéroport sans nous tromper et récupérons Dave que je rencontre aussi pour la première fois. Normalement il se bat dans l’équipe écossaise mais une blessure l’a obligé à s’arrêter temporairement, c’est pourquoi, il ne vient qu’en tant que commentateur et qu’il n’a qu’un pack sac avec lui. C’est un type sanguin comme Benoit, la conversation est très animée et constante, j’essaie désespérément de comprendre, par chance Benoit me traduit tout ce qu’il peut et surtout quand ça touche mes intérêts. Cependant, comme je comprends à peu près tout ce que Ben dit car je suis habituée de l’entendre parler en anglais, ça me permet de deviner ce qu’ils se disent.

Je pense que lorsque Benoit accompagnera Dave dans la tour, ils formeront un duo de commentateurs super efficace. C’est une tâche qui sera partagée aussi avec Brendan et Dale qui ont fait un excellent travail l’an dernier et s’ajoute aussi Adam, chez qui nous sommes allés en Allemagne avant le tournoi en Pologne. Les commentateurs sont tous aussi des combattants ou du moins, l’ont déjà été, ce qui signifie qu’ils connaissent ce sport intrinsèquement et sont en mesure de faire des analyses, des commentaires et parler des athlètes dans la lice, qu’ils connaissent bien souvent. Et cette année, nous aurons un Écossais, un Irlandais, un Américain, un Allemand d’origine polonaise et un Québécois qui commenteront au fil du tournoi. Toute cette brochette d’accents reflète bien la multitude culturelle de l’événement. En ce qui me concerne, je crois bien que c’est cette rencontre multiculturelle qui m’intéresse le plus dans cette grande aventure que nous vivons depuis cinq ans. C’est aussi cette fascination de la nature humaine qui fait de moi une anthropologue.

dimanche 11 mars 2018

Spøttrup





Cette nuit-là j’ai compris pourquoi Thor, dieu du tonnerre était l’un des principaux dieux du panthéon nordique et pourquoi il fut le plus vénéré avant l’ère chrétienne et même après. En effet, nous avons eu droit, une bonne partie de la nuit à des coups de tonnerre comme je n’en avais jamais entendu auparavant. Nous voyons ça comme un bon présage, Thor, a béni de son marteau, notre arrivée en ses terres, chez ses gens, sans nous inonder de pluie. Nous sommes rassurés, tout de même, nos tentes ne sont pas directement sur le sol, donc si nous avons de la pluie, nous ne pataugerons pas dans l’eau durant la nuit.

Il est encore très tôt mais le ciel est déjà clair, clair comme s’il l’était depuis un bon moment déjà. J’en profite pour aller aux douches alors que la plupart des gens ont l’air de dormir encore. Je m’habille en civil, les costumes c’est pas avant jeudi, puis je vais rejoindre mon chum à la cantine. Les forfaits repas commencent ce matin, mais Benoit qui ne l’a pas pris pour lui (pour des raisons évidentes quand je vois le gluten, présent partout sur la table) n’accepte qu’un café et se contente d’une barre protéinée et d'une banane. Aujourd’hui nous irons à l’épicerie pour faire des provisions pour lui surtout.

La cantine se remplit vite, nous retrouvons déjà plusieurs connaissances et ami(e)s arrivées depuis hier, c’est un peu comme lorsque j’étais petite et qu’on retrouvait des membres de la famille quelque jours avant le réveillon de noël ou du jour de l’an. Une époque où l'on fêtait vraiment et avec des gens qu’on ne voyait qu’une ou deux fois par année. On ne le fait plus vraiment et c’est peut-être pourquoi j’en profite autant à chaque tournoi mondial.


Benoit sera occupé une partie de la journée avec Magnus et Bo, le directeur du musée attenant au château de Spottrup. Ils ont transformé la salle de conférence en bureau administratif et en entrepôt pour tout le matériel qui servira lors du tournoi. Une visite du château est offerte plus tard en journée à ceux et celles que ça intéresse, et comme Benoit l’a déjà fait lors de l’assemblée générale en novembre et qu’il a du travail devant lui, il décline l’offre. Mais Andrew, Annie et moi nous ne voulons pas manquer ça.

Laurie, Dom, Bear et Jérémie arrivent en avant midi en mini van, ils sont arrivés au Danemark quelques jours plus tôt et ont fait un peu de tourisme à Copenhague. Ils iront cet après-midi, avec le reste du groupe de Québécois visiter Legoland à Billund. Comme nous ne sommes pas du tout intéressés par cette activité, nous préférons rester pour visiter les alentours. Il fait un temps magnifique et le paysage semble sortir d’une toile impressionniste, avec son champ d’épis de blé encore verts, les cygnes qui se prélassent dans le cours d’eau devant le château et des horizons flous qui baignent dans cette belle lumière du jour, sans trop de présence humaine. Bien sûr ça va changer à mesure que le temps s’amenuise, d'ici jeudi, des marchands commencent déjà à arriver pour s’installer, du moins les reenacteurs qui accompagnent certaines équipes. Des tentes vont bientôt se dresser aux côtés de celle de Julia, sur le terrain de l’autre côté du chemin et d’autres marchands indépendants des équipes vont être installés autour du musée, formant un marché médiéval sous les arbres.

Nous descendons tous les quatre au musée, laissant sur place, Benoit qui s’en va travailler avec Magnus, et nous suivons Bo qui nous propose d’être notre guide pour une partie de la visite, il nous autorise ensuite à nous promener où bon nous semble dans le château qui est la partie centrale du musée. Le gouvernement l’a récupéré après qu’il fut détruit en partie par un incendie en 1937, le restaura et l’ouvrit au public en 1941 en tant que musée. C’est un château qui est assez tardif puisqu’il date du 16ième siècle, donc, non pas issu du Moyen âge mais de la Renaissance. Si au départ, le domaine sur lequel sera construit le château a été acquis par le diocèse, il passera aux mains de la couronne avant d’échoir dans la noblesse danoise et de connaître maints et maints propriétaires. Certains ont entrepris des travaux de restaurations, mais les dernières années avant qu'il ne fut récupéré par le gouvernement, il avait fini par être abandonné, trop coûteux à entretenir.

Notre guide laisse glisser dans ses informations (que je comprends à moitié) que le château a la réputation d’être hanté, qu’il y a eu témoignages d’apparitions de dames et de pièces plus froides que d’autres. Mais sans s’attarder sur ce commentaire, il poursuit un peu avec nous, et nous informe qu’il a beaucoup de travail et que nous pouvons nous promener partout. Tous les trois nous partons à l’aventure…


Située au rez-de-chaussé, partie plus ancienne du château qui est fort probablement devenu la cuisine des domestiques.

Aussi au rez-de-chaussée, à l'évidence, c'est là qu'on cuisinait.




Sans la literie et les draperies c'est un peu vide mais avec de l,imagination...


Superbe armoire que j'aurais volontiers rapporté chez-moi.


Les toilettes privées dans la chambre, c'est la grande classe.

Faut imaginer les tapisseries colorées et le feu dans la cheminée.


Le dessus d'une table.

Brrrr le grenier..


Est-ce que j’ai vu des fantômes? Non, mais j’avais quand même de temps en temps des impressions étranges, et je dois avouer que je n’aurais pour rien au monde visité seule le grenier, frissons garantis.



Au bout d’une heure, nous sortons, moi pour aller rejoindre Benoit et lui rappeler l’importance de « manger » tandis qu’Annie et Andrew vont se promener autour du château.



Andrew et Annie fôlatrant main dans la main.


L’après-midi se passe surtout en exploration pour moi, je découvre le petit jardin aux herbes entretenues avec amour et vendues sur le marché. C’est un petit havre de paix, avec ses arbres autour et son petit banc qui invite les amoureux ou les jambes fatiguées. Benoit retourne s’enfermer au musée pour continuer à travailler après que nous nous soyons donné un rendez-vous dans deux heures. Tout au long de mon parcours pour me rendre au Centre sportif, je croise des nouveaux arrivants, nos ami(e)s japonais, visiblement aussi heureux que moi de les revoir, je discute un bon moment avec Yoko et Kiyoka, malheureusement Jay n’a pu venir cette année. Je les laisse s’installer dans leurs tentes et j’emmène mon Blackberry pour pouvoir aller prendre mes messages, nous avons la chance d’avoir le Wi-Fi mais seulement à l’intérieur du centre, c’est pourquoi, y a déjà pas mal de gens installés un peu partout qui ont eu la même idée que moi. Toutefois les tentes sont toutes équipées avec des prises de courant, nous permettant ainsi de charger nos appareils ou d’utiliser tout autre appareil électrique.


Le Centre est génial, au rez-de-chaussée, il y a un gym qui est ouvert pour tous, un petit salon au milieu avec fauteuils confortables, une cantine suffisamment grande pour accueillir 50-60 personnes, mais en bas près du gym, il y a aussi plusieurs grandes tables où l’on peut s’asseoir. L’équipe qui s’occupe de la cantine et donc, de notre forfait repas est d’une grande gentillesse, les employés semblent faire partie de la même famille que la patronne, notre chef cuisinière. Ils comprennent l’anglais, mais pour la plupart d’entre eux c’est clair qu’ils ne l’utilisent pas souvent. Cependant, ils font un immense effort pour comprendre et accéder à nos demandes le plus souvent possible.

L’autobus apporte un autre gros groupe en après-midi, dont Cloé, Béné, Amélie et Yan, nous leur montrons où est le groupe de Québécois, très visible avec nos drapeaux accrochés aux cordes qui tiennent les poteaux, ils se choisissent une tente et s’installent à leur tour. Moi je sors le reste de nos bagages de la voiture et je les mets sous la tente, temporairement, car nous irons chercher des amis écossais à l’aéroport de Billund après nos achats à l’épicerie quand Ben viendra me rejoindre.

Y a nos amis irlandais aussi qui sont arrivés, Lara est là avec Piotr, Killian, Jack, les deux Brendan et Caroline qui est maintenant la photographe officielle pour l’IMCF. Pour nous c’est vraiment comme la « parentée » qui commence à arriver pour le party des fêtes, tout le monde est fébrile! Benoit vient me rejoindre et retrouve lui aussi avec joie, les gens qui sont arrivés et qu’il n’a pas encore vu, étant dans le bureau depuis le début de la journée. Y a aussi nos amis américains qui sont là depuis deux jours, les Néo-Zélandais arrivés aujourd’hui, ainsi que les Mexicains, dont certains déjà rencontrés en Argentine deux mois avant.

Nous n’avons pas le temps de nous attarder, nous montons en voiture avec Andrew et Annie qui iront récupérer la voiture qu’ils ont réservé à Billund après notre arrêt à Skive afin de trouver de la nourriture pour Benoit.

Même si en principe nous devrions connaître maintenant le chemin, nous avons encore besoin de notre papier google map, il y a beaucoup de ronds-points et tous les noms se ressemblent. Comme nous descendons au sud lorsque nous quittons Skive pour Billund, nous gardons à l’esprit que le soleil couchant doit se trouver sur notre droite la plupart du temps. C’est peut-être rudimentaire comme méthode, mais elle a prouvé mainte et mainte fois son efficacité, alors que notre google map et le gps d’Andrew ne sont pas toujours fiables. Quand nous nous retrouvons sur une route principale, au nom imprononçable (pour moi elles le sont toutes!), je sors les raisins, le fromage, les craquelins et des charcuteries sans gluten, et des chips pour nous nourrir mon chum et moi pendant qu’il conduit. Aussi bien manger tous les deux, la cuisine au Centre sera fermée quand nous reviendrons de toute façon.

Le comptoir de location d’auto est à l’aéroport, nous laissons donc descendre Andrew et Annie et attendons que Jacob, Kim et son amoureux passent la sortie. L’aéroport est petit, celui de Copenhague m’est aussi apparu beaucoup moins grand que je l’avais imaginé. Comme pour Dublin, je réalise que le Danemark, comme l’Irlande, bien qu’ils soient des pays chargés d’histoire, sont plus petits et moins populeux qu’au Québec. Quand les capitales Copenhague et Dublin ont des populations d’environ 500 000 individus et qu’il y a d’autres aéroports dans le pays, les grands aéroports comme le nôtre à Montréal, serait inutilement grand.

Au bout d’une dizaine de minutes, les trois Écossais arrivent avec chacun un bagage, le reste a été mis dans un gros camion avec le reste des armures et bagages des autres Écossais et seront apportés directement à Spottrup. Je vois enfin Jacob, ça fait des mois qu’il discute via messenger avec Benoit depuis que celui-ci négocie avec Scone Palace pour le tournoi de l’an prochain. En principe, c’est ce qui est prévu, mais rien n’a été officiellement signé ce qui rend Benoit très nerveux. Il doit au moins avoir la confirmation de la responsable et il est sans nouvelle depuis quelques jours. Comme on dit « Il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. » alors on attend en priant pour pouvoir divulguer la bonne nouvelle lors de la cérémonie de clôture dimanche.

Nos passagers discutent avec Benoit, mais j’ai un peu de mal à tout saisir, éventuellement mon oreille se fera à leur accent. Jacob est Anglais mais vit depuis presque toujours au Shetland, îles à l’extrême nord de l’Écosse, tandis que Kim et son copain sont Écossais. Nous réitérons à propos de la noirceur qui n’est jamais complète, mais bien sûr nous avions oublié que l’Écosse étant plus au nord, ils connaissent ce phénomène. Aux îles Shetland, ils connaissent comme en Islande, au Norvège, en Suède et en Finlande, le soleil de minuit autour du solstice d’été. C’est pourquoi aussi, le ciel du Danemark n’est jamais totalement obscurci en ce moment, un peu trop loin du cercle polaire mais pas bien loin non plus. Pour ces pays qui vivent des périodes de clarté pendant 24 heures sur plusieurs semaines, ils connaissent aussi la noirceur totale pendant plusieurs semaines autour du solstice d’hiver. Je me souviens d’avoir vu un reportage il y a bien des années à propos de ces gens qui y vivent et qui ont besoin de luminothérapie pour pallier le manque de soleil et de vitamine D.

Nous réussissons à ne pas nous perdre et arrivons à destination au Centre qui grouille encore d’activités : quelques-uns sortent des douches, d’autres se prélassent, jouent au babyfoot, naviguent sur le Net, discutent à l’extérieur bière à la main. Jacob apporte une caisse de cidre pour Benoit, comme il lui avait promis quelques semaines auparavant, au grand plaisir de Benoit qui peut faire comme tout le monde et « prendre un verre » avec les ami(e)s. Toujours cette lueur dans le ciel au loin comme pour nous mettre au défi de rester éveillé, mais la raison finit par l’emporter, demain c’est la dernière journée avant le tournoi et il reste encore beaucoup à faire, du moins pour le vice-président, qui une fois de plus ne fait jamais les choses à moitié.