lundi 19 juin 2017

Portugal, que le tournoi commence!

Tournoi, jour 1


Une belle journée ensoleillée accueille ce troisième tournoi d’IMCF, et nous sommes tous un peu fébriles attendant de défiler pour la cérémonie d’ouverture qui doit commencer d’une minute à l’autre. J’ai décidé de ne pas défiler avec le groupe, j’aimerais prendre des photos, et je dois l’admettre, je trouve toujours un peu pénible de rester plantée au soleil à brûler pendant le discours d’ouverture. Les 22 équipes attendent en ligne, qu’on les nomme pour s’avancer dans la lice, en fait les 21 plus un combattant d’Afrique du sud qui est venu seul pour représenter son équipe. L’atmosphère est joviale, comme toujours, les combattants se retrouvent avec plaisir, indifférents au soleil et à la chaleur déjà présente et qui ne les épargne pas sous leur attirail. Certain(e)s portent une partie de leur armure, généralement les jambes, bras et épaules avec leur tabard aux couleurs de leur pays.  Il n’y a pas beaucoup de spectateurs dans les estrades, mais en considérant que nous sommes le jeudi matin, ce n’est guère surprenant, je suis certaine que si cette cérémonie avait lieu le soir il en serait bien autrement. Toutefois, il a été convenu entre l’IMCF et la municipalité de Montemor que l’entrée serait gratuite, nous prévoyons un bon achalandage d’ici les quatre prochains jours.

L’Ost du Québec a apporté un drapeau gigantesque, il flotte fièrement, presque effrontément parmi les autres, comme pour compenser tous ces moments où normalement il est relégué derrière le drapeau canadien. Est-ce que cette année nous aurons la chance d’entendre de nouveau l’air de Martin de la Chasse-Galerie? Aurons-nous des médaillé(e)s d’or? Ce drapeau flottera-t-il sur le podium? Nos premiers duellistes aujourd’hui sont Cloé et Phil, dans les catégories féminine et masculine à la hallebarde. En après-midi, notre équipe masculine affrontera l’Allemagne et le Mexique. Cloé qui commence ses combats avec une armure empruntée, est un peu nerveuse, celle-ci n’étant pas ajustée pour elle, limite ses mouvements, elle est presque incapable de lever les bras au-dessus de sa tête. Nous espérons que son armure arrive au plus tôt pour qu’elle puisse se battre à pleine capacité.

Quand les combats débutent, Benoit est au micro, annonçant les concurrents, et voyons la nervosité de Cloé, je vais le chercher et tente de lui parler et quand il me fait signe qu’il est occupé, je me fâche et j’insiste : «Tu as entraîné Cloé toute l’année, elle n’a pas son armure, elle est nerveuse, elle a besoin de TOI, y a plein d’autres personnes qui peuvent faire l’annonceur, mais personne ne peut aussi bien calmer Cloé!». Sans hésiter, il donne son micro à l’un des arbitres et vient retrouver Cloé pour prendre son coin, la rassurer et consacrer ce moment à elle. J’ai maintenant l’esprit tranquille.

Dans la grande lice, il y a d’aménagées temporairement, trois petites lices pour les duels, d’abord parce que ces combats nécessitent beaucoup moins d’espace et puis parce que ça permet de faire plusieurs duels en même temps. Nous n’avons plus tellement de choix, il y a de plus en plus de participants et ça doit tout tenir dans quatre jours.  Les Québécois font le va et vient entre les combats de Phil et ceux de Cloé, moi je suis particulièrement attentive à ceux de Cloé, je l’avoue j’ai un parti pris et je sais aussi à quel point Benoit prend l’évolution de son élève à cœur. Phil ne gagne aucun de ses combats, mais donne tout un show, et pendant ce temps, Cloé gagne contre la Canadienne et contre l’Allemande, perd contre la Portugaise et finalement la chaleur et la fatigue la gagnant elle doit déclarer forfait contre l’Américaine. Toutefois, elle se rend en finale un peu plus tard dans la journée, on espère tous, en particulier elle, que son armure arrivera entre temps.

Je vais faire un tour du côté des marchands, question de me restaurer un peu, on m’a dit qu’il y avait pas mal de trucs intéressants à manger, je demande à Benoit s’il veut quelque chose, mais comme il doit se battre en équipe un peu plus tard, il refuse, de peur d’être malade. Je vais donc me balader avec Silvia qui est bien contente de pouvoir me servir de guide concernant la culture portugaise particulièrement sa gastronomie. Les gens sont très accueillants, et je vais de surprise en surprise quand je vois à quel point beaucoup de Portugais connaissent quelques rudiments de la langue française, beaucoup plus que la langue anglaise en fait. Bien sûr vous me direz que c’est normal puisque c’est une langue latine comme le français, bien qu’elle s’apparente aussi aux langues arabes, mais c’est surtout parce qu’à cause de la proximité des deux pays, beaucoup de Portugais ont travaillé jadis ou travaillent encore en France, plusieurs ont de la famille qui est partie y vivre, comme les parents de Silvia.

Je crois que nous sommes tellement conditionnés à l’idée que la langue anglaise domine le monde, que spontanément, dès qu’on voyage ailleurs qu’en francophonie, on utilise l’anglais pour se faire comprendre de la population locale et je ne fais pas exception. Pourtant à force de voyager, je constate parfois que si oui la langue anglaise domine, il n’en demeure pas moins que le français a déjà été très présent, la France ayant été un empire colonisateur puissant, en Afrique, en Amérique et même en Asie. On oublie aussi qu’il fût un temps où c’était la langue la plus couramment utilisée chez les têtes couronnées d’Europe au 18ième siècle et même en Angleterre, au Moyen Âge. Beaucoup de francophones ne savent pas que certains de leurs mots qu’ils croient être empruntés de l’anglais sont en fait des mots français, récupérés par la langue anglaise, comme par exemple le mot «budget» qui tire son origine du mot «bougette» qui désignait une petite bourse de monnaie attachée à la ceinture et qu’on portait en voyage. Quand je suis à l’extérieur du pays, je suis encore surprise de susciter aussi souvent de l’intérêt quand je m’adresse en français à Benoit ou à un autre Québécois, soit on se fait aborder par des francophiles, qui trouvent notre langue si belle, soit on nous demande qu’elle est cette langue étrange qui ressemble au français sans en être vraiment.

Nous sommes toujours fiers de leur en parler! Je l’ai déjà dit dans une chronique précédente, seuls les Québécois qui ne connaissent que le camping en Floride ou les tout inclus à Cuba peuvent avoir une perception négative des Québécois en voyage. Car un Québécois qui voyage en dehors de sa zone de confort, démontre généralement une ouverture sur les Autres et leur culture et ça c’est le meilleur passeport qui soit. Nous avons beau être reconnus pour être souvent bruyants et directs, notre curiosité nous rend facile d’approche. Bien sûr, y aura toujours des cons, n’importe où dans le monde et on ne fait pas exception malheureusement…

Lorsque nous revenons au «french ghetto» (ironiquement nous lui donnons un non anglais pour que les non francophones comprennent que c’est un quartier francophone, nous, nous le savons déjà), il y a beaucoup d’animation, les finales des duellistes en hallebarde et le béhourd des gars vont bientôt commencer. Excellente nouvelle, Cloé a reçu son armure qu’elle examine pour s’assurer que tout est bien en place, elle a dessiné sur son casque des cicatrices partout où son casque a été cabossé lors des derniers combats, ça lui donne une allure personnalisée. Les combats de béhourd ont commencé depuis une bonne heure et l’Ost embarquera dans la lice après les finales de duellistes, dont le dernier combat de Cloé. Le reste du groupe, incluant les Belges qui ne présentent pas d’équipe cette année, se tient prêt à aider tout ce beau monde au besoin. Cette année, notre campement est vraiment tout près, le transport du matériel, les casques, mitons, boucliers, armes et drapeau est plus aisé.


Benoit s’armure en même temps que Cloé, car il veut pouvoir la coacher jusqu’au bout, il ne pourra profiter de ce moment pour se préparer. Lorsque nous franchissons l’entrée, le ciel s’est assombri et les estrades sont maintenant pleines. Certains d’entre nous lancent des bonbons à l’érable dans la foule qui suit attentivement le tournoi. Les spectateurs sont ravis, surtout les enfants. Ceux et celles qui ne se battent pas gardent précieusement, les cellulaires, lunettes, portefeuilles, caméras et crème solaire. Laurie a amené sa tablette, elle prend nos combats en vidéo et des photos avec son I-phone. De temps en temps je la croise, grimpée où elle peut, pour réussir à avoir une bonne prise de vue, elle n’a pas le choix vu sa petite taille. Pour ma part, j’utilise nos deux cellulaires pour prendre des photos, n’ayant pas de batterie, je ne peux que les recharger le soir au condo, si je veux prendre des photos et des vidéos je dois les utiliser avec modération. Mais j’oublie trop souvent de m’en servir, trop prise par le moment présent.

Cloé s’avance dans la lice, suivie de Benoit à qui il ne manque que le casque et les mitons. Comme il a oublié son tabard au Québec, Christine lui a prêté le sien tout neuf avec un p’tit pincement au cœur, ce matin son armure toute neuve et cet après-midi c’est son tabard. Elle se dit avec philosophie que ça lui portera peut-être chance. L’adversaire de Cloé est impressionnante, elle a une tête de plus et doit bien peser 60 kilos de plus qu’elle. Évidemment ça peut désavantager l’Américaine dans son cardio, mais sa longueur de bras l’avantage certainement quand elle porte ses coups, tenant Cloé à distance. Celle-ci bouge beaucoup plus et se bat si bien qu’un quatrième round est nécessaire pour déterminer qui gagnera l’or. Benoit comme à son habitude entre dans la lice entre chaque round, pour se placer devant ses yeux, pour lui rappeler de respirer, pour lui faire oublier son adversaire si grande et si costaude de l’autre côté, pour la rassurer et l’encourager, jamais pour lui rappeler ses erreurs. Comme il le dit souvent, quand tu pratiques des sports de combat, ça vient chercher quelque chose de primitif en toi, ça a quelque chose d’animal et tes émotions sont, au moment du combat, très brutes, ce qui fait que tu dois trouver un certain équilibre entre émotion et raisonnement, ce pourquoi, beaucoup d’athlètes ont souvent des rituels et des coachs qui les aident justement en ce sens. Les combattants peuvent être terriblement à fleur de peau et avoir du mal à se contrôler, par exemple après une défaite, éclater en sanglots et se sentir complètement démolie. À ce moment-là on n’a certainement pas besoin de se faire crier dessus ou de se faire rappeler nos erreurs, ça n’aide absolument en rien pour reprendre confiance en soi. Faut alors chercher les points forts, et convaincre le ou la combattante de les faire rejaillir, ça et gérer les crises de panique c’est pas toujours facile. D'ailleurs, Cloé est un peu dans cet état et spontanément engueule son coach, mais Benoit reconnait cet état et n'en fait pas de cas, la ramenant constamment dans un état plus calme.

Après le quatrième round, Cloé s’incline devant l’Américaine et remporte la seconde place, l’argent! Wow! Nous sommes fiers d’elle! Cependant, nous avons peu de temps pour profiter de sa victoire puisque nos gars vont bientôt commencer.


Dans la cour aménagée de la forteresse de Montemor, les combattants de l’Ost, attendent leur tour pour entrer en piste. La fébrilité, la peur, l’adrénaline peut-être le doute sont au rendez-vous, des émotions qui surpassent l’inconfort de la chaleur. Le malaise est amplifié par l’épaisseur du tissu sous le poids de l’armure et le manque d’air à l’intérieur de leur casque qui pourtant, les protégeront de la violence des coups d’épée ou de hache frappés à pleine puissance par leurs adversaires.

Moi qui suis tout près, je ressens bien cette tension et je ne peux m’empêcher de penser à ces gladiateurs qui attendaient sous le forum, à la différence près que ceux-ci luttaient pour leur survie. Il devait en être ainsi aussi au Moyen âge, sur le campement quand se préparant au combat, le guerrier craignait pour sa vie. Mais il devait tout de même trembler aussi lors de tournois organisés. Bien sûr, ce dernier était habitué à la violence, ça faisait partie de son monde mais si l’on exclue les blessures et les coups de chaleur, le béhourd était un sport divertissant qui lui permettait d’améliorer ses techniques, de se mesurer aux autres et évidemment de se faire remarquer. 

Cependant, aujourd’hui, nos gladiateurs des temps modernes ne sont pas des soldats, ils gagnent leur vie dans un monde aseptisé où la violence est devenue un tabou. Pourtant, ils sont là, de leur plein gré, attendant leur tour, concentrés à chercher en eux une violence transmise par leurs tout premiers ancêtres, une violence primitive afin de la canaliser et de la projeter dans leurs coups.

Le commentateur annonce l’entrée en lice des deux équipes de cinq combattants. Les Québécois avec leur tabard bleu et blanc, retenu par leur ceinture fléchée pénètrent dans la lice aménagée deux jours plus tôt, à quelques mètres des estrades de spectateurs, pleines à craquer d’une foule aussi enthousiaste que s’il fut s’agit d’un match de soccer. Les adversaires prennent place en face les uns des autres, aux deux extrémités, se jaugent, se mesurent, évaluent, repensent à leur stratégie. Est-ce que chacun se souvient de ce qu’il doit faire? Les voilà à s’échanger quelques rappels juste avant que le round commence.  Ils affrontent l’équipe de l’Allemagne, une équipe aguerrie qu’ils connaissent bien, puisque celle-ci comme celle du Québec et de l’Italie, furent les premières à rejoindre en 2011 le tout premier tournoi de Béhourd qui était subventionné et organisé pour et par la Russie et ne concernait que l’Ukraine, la Pologne et la Biélorussie.

Tout se décidera en trois rounds d’une durée indéterminée car le but est de faire tomber les adversaires en frappant avec les armes ou les poings, en se servant de prises de lutte ou de plaquages, etc.  Presque tous les coups seront permis et c’est pourquoi les armures doivent être réglementaires, sécuritaires et confortables… autant que possible.

L’arbitre en chef, avec un signe de tête s’assure que les équipes soient prêtes et crie «fight!», s’ensuit alors les mouvements d’avancée puis le choc brutal des armures qui se fracassent l’une contre l’autre. On repère rapidement les «runners» plus rapides et les lourds qui s’emparent souvent à bras le corps de leur adversaire pour les faire tomber ou pour les tenir afin qu’un autre frappe pour le faire abandonner. Trois ou quatre arbitres se tiennent à l’intérieur et l’extérieur tout près de la rampe et surveillent bien les combattants et leur rappellent qu’ils sont «out» lorsqu’il y a trois points d’appui par terre, ou quand l’un s’agrippe trop longtemps au montant de la lice pour éviter de tomber ou pour être en mesure d’intervenir rapidement s’il y a blessure. Ils sont tous vêtus de jaune pour qu’on les repère facilement. Pour le spectateur, il est difficile de savoir ce qui se passe sous l’armure et surtout sous le casque, c’est pourquoi la promiscuité de l’arbitre est importante, de même qu’il doit, s’il veut arrêter le combat se servir d’un grand bâton auquel est accroché un drapeau jaune. Il va l’abaisser immédiatement entre les adversaires, qui sont restreints au niveau de la vue et de l’ouïe.

Le premier round est remporté par Québec! La foule applaudit, l’équipe du Québec est souvent populaire lors des tournois. J’ai souvent remarqué une sympathie générale pour les Québécois, peut-être est-ce dû à leur curiosité, une ouverture qui les amène à socialiser rapidement avec leurs hôtes, ou bien parce qu’ils se démarquent par des gestes particuliers, originaux lors des tournois.
La lice se vide et les combattants ont hâte de boire un peu d’eau, certains enlèvent rapidement leur casque, d’autre préfèrent le garder pour la minute de pause et ne soulever que leur visière pour se rafraîchir et se désaltérer.

Je me tiens près de mon homme qui entrera à son tour au round suivant pour prendre la place d’un autre, je sais qu’il ne me voit plus, ne m’entend plus, il est connecté direct avec son équipe et toute cette puissante «aura» de testostérones. Il savoure peut-être les clameurs de la foule. Il ne tient plus en place, prend une gorgée d’eau et met son casque, je lui attache sa sangle sous le menton, c’est déjà un sauna là-dessous! Je me sens un p’tit peu coupable de fuir le soleil et de maudire « silencieusement » la chaleur, moi dans ma robe médiévale, lui sous 35 kilos de tissu et d’armure s’apprêtant à faire un sprint de cardio.

Des journalistes s’insèrent un peu tout le tour pour maximiser les belles prises de vue, ils détonnent tellement avec leur jeans et leurs lunettes fumées dans tout ce spectacle vivant sorti tout droit du Moyen âge, c’est la règle lors des tournois internationaux, combattants et accompagnateurs doivent en tout temps être costumés historiquement correct. J’avoue que pour le spectateur ça ajoute beaucoup d’allure à l’événement! Parfois des spectateurs réussissent à se glisser mais sont vite repérés justement à cause de leurs vêtements, ils sont alors reconduits dans les estrades.

Voilà qu’on annonce le deuxième round!

Même rituel de l’arbitre en chef, et puis «FIGHT!»

Ça joue dur, ça joue fort, encore tout cet acier qui crie sous les coups. Je surveille de près mon guerrier préféré et récite une mini prière silencieuse, pour la forme, pour qu’il donne plus qu’il n’encaisse et surtout qu’il ne se blesse pas. Une entorse, une commotion, une blessure au visage à cause d'un casque mal «padé», une fracture, ce sont des choses qui arrivent sporadiquement, comme au football ou au hockey. C’est juste que c’est toujours spectaculaire de voir un tank foncer avec sa hache et frapper de toutes ses forces sur un casque, ça l’est d’autant plus quand sous ce casque c’est quelqu’un qu’on aime très très fort.

Mais voilà que le Québec gagne aussi le deuxième round, donc la victoire totale!
               
Délire!
J’observe Benoit qui ne semble pas blessé, soulagement, fierté, plaisir partagé.

Je me délecte des rugissements de la foule, il en aurait été autrement si l’équipe adverse avait été celle du Portugal.

Les combattants des deux équipes vont se saluer, se prendre dans leurs bras, se féliciter et sortir afin de laisser les équipes suivantes prendre place à leur tour pour la suite des combats. Les Québécois qui se sont hâtés d’ôter leur casque, maintenant jubilent! Les Allemands sont des adversaires coriaces mais ce sont aussi des amis, et en moins de deux, les voilà qui fraternisent tous ensemble sous la grande tente, se gratifiant de leurs bons coups et partageant des trucs d’art martiaux. C’est un des aspects qui me laissent toujours sans voix mais qui me fait sourire aussi, cette fraternité qui semble n’avoir d’égale que dans la violence d’un sport aussi brutal. Comment peuvent-ils exprimer une telle décharge de violence sur quelqu’un, même si c’est dans le cadre sportif, et l’instant d’après être capable de rire autant avec lui?


Déjà, ils doivent se préparer pour affronter leurs seconds adversaires, les Mexicains et cette fois Ben est du premier round, Andrew sur son flan gauche. L’Ost est super efficace et gagne rapidement le premier round, puis le deuxième round, les gars sont gonflés à bloc! Ils sont en quart de finale, puisque la quatrième équipe du pool s'est désistée quelques jours avant le début du tournoi. Samedi, ils se battront à nouveau!



Peu après, Benoit découvre que sur l’image de présentation du streaming suivi par des milliers d’internautes, le logo de l’IMCF n’apparaît pas, il va rapidement rencontrer l’un des réalisateurs qui se tient à l’intérieur d’une tour pour lui rappeler que ça avait été envoyé et que ça aurait dû y être. C’est quand même important puisque c’est d’abord un tournoi IMCF. Le réalisateur s’obstine, arguant qu’il s’en fout du logo, que ce n’est guère important, il ne veut rien savoir, Benoit doit donc menacer d’arrêter le tournoi, en empoignant un paquet de fil tous branchés à la console et en menaçant de tout débrancher drette là avant que finalement le réalisateur accepte de mettre le logo. Quand il a accepté de faire partie du présidium, il savait d’emblée que ce serait beaucoup d’énergie et de travail, mais quand il prend une responsabilité, il la prend au sérieux.


La journée s’achève et nous décidons de souper tous ensemble en ville, au même restaurant ou nous avons rencontré les parents de Brendan et l’équipe décide de payer le lunch et la bière de Cloé pour sa médaille d’argent. 

dimanche 11 juin 2017

Portugal, veille du tournoi (partie 2)



Figueira la foz est situé à mi-chemin entre Porto et Lisbonne, donc au centre sur l’axe Nord-Sud du pays et complètement à l’ouest. Nous partageons notre condo à sept personnes, nous cinq, plus Béné et Laurie qui arrivent aujourd’hui et le condo adjacent accueille les huit autres Québécois, Christine et Gabrielle qui forme avec Cloé et Béné, l’équipe féminine, une grande première cette année! Régis, Jérémie, Yan, Igor, Phil et Nick complètent avec Ben et Andrew l’équipe masculine.

Notre logement est vraiment génial, il est super confortable et situé sur le bord de la mer mais je ne crois pas que nous aurons beaucoup de temps pour en profiter vraiment. Aujourd’hui nous voulons nous rendre à Montemor sur le lieu du tournoi, Benoit a réservé à un marchand, une tente médiévale, pour que nous puissions y laisser les armures en tout temps, nous voulons nous assurer qu’elle est bien sur place. Tout le monde est bien curieux de voir l’endroit et de toute façon Benoit a un meeting avec Nuno et le reste du présidium, le tournoi a tout de même lieu dès le lendemain, il reste tellement encore à faire.

Il y a une grande chambre au grenier et Cloé a décrété que c’était dorénavant sa chambre, y a personne qui a eu à redire, de toute manière, celle-ci souffre fréquemment d’insomnie sévère et quand elle finit par dormir, elle peut dormir plusieurs heures, c’est donc une bonne chose que sa chambre soit un peu retirée pour éviter qu’elle ne soit dérangée. Quand je vais la réveiller ce matin, elle est justement en phase sommeil et émerge un instant pour me dire qu’elle va rester à dormir. Aucun problème, si y a bien un moment où elle peut récupérer c’est aujourd’hui, et puis y a aussi l’espoir que son armure arrive aujourd’hui au condo qui, peut-être, la retient ici. On ne tarde pas trop au condo, après avoir défait un peu les valises et pris un café à la cuisine, Ben, Andrew, Luc et moi, prenons la route pour le village voisin.






Nous apercevons les murs de la forteresse de Montemor-o-Velho longtemps avant de l’atteindre, elle est majestueuse, surplombant le village et ses rizières à perte de vue. Même si le château a subi durant les siècles de nombreuses restaurations, la construction originale date du 10ième siècle et servait de fortification islamique et de mosquée. Après de nombreuses campagnes militaires, quand Montemor passe aux mains des Chrétiens au 11ième siècle, le château est reconstruit sous Alphonse VI de Castille. On y ajoute par la suite une chapelle qui après plusieurs reconstructions, subsiste encore et on érige la forteresse défensive contre les Arabes. Mis à part la chapelle, il n’y a pas de gros édifice central comme on en trouve souvent au cœur des forteresses, mais plutôt des bâtiments imbriqués dans les murs fortifiés.

Nous stationnons notre voiture le plus près possible, et entrons sur les lieux qui sont déjà envahis de nombreuses personnes toutes occupées à installer les estrades pour les spectateurs, de marchands déballant leur pavillon et leurs marchandises et de combattants et amis venus installer leur campement. Les Américains et les Néo-Zélandais ont comme nous, loué des chambres ou des condos, c’est le problème quand on doit prendre l’avion, nous sommes très limités dans le transport de marchandises incluant le matériel pour camper sur place. Bien sûr y a aussi des Européens qui prennent l’avion, mais ils ont tout de même la possibilité de prendre un train ou une voiture. Certains groupes désignent une ou deux personnes qui transportera en camion les armures et le campement pendant que le reste de l’équipe prendra un avion avec un minimum de bagages. Tristement, les Japonais ne seront pas du tournoi cette année pour des raisons financières, Benoit l’a appris il y a quelques semaines en discutant avec le capitaine de l’équipe, nous avions tout de même un petit peu d’espoir qu’à la dernière minute un miracle se produise… mais non.

Cette année, les représentants de l’Amérique du Nord sont plus nombreux puisqu’il y a de nouvelles équipes participantes, le Mexique et l’équipe du Canada qui est venue à notre tournoi hivernal. Ces derniers n’ont pas de tente médiévale et comme nos amis belges nous en proposent une, nous leur prêtons celle qui a été louée par Benoit, ils n’auront qu’à payer la moitié de la location eux-mêmes. Comme l’an dernier nous partageons notre coin avec les Belges et les Français, et nous surnommons ce petit quartier le «french ghetto», l’équipe canadienne est en sous nombre en tant qu’anglophone mais accepte son sort de minorité sans problème se mêlant aux autres avec plaisir. Ici à l’IMCF, c’est l’équipe du Québec que l’on connaît, puisque celle-ci est un membre fondateur de l’IMCF, l’Ost du Québec, avec l’Italie et l’Allemagne, sont les premières équipes en dehors du bloc de l’Est à participer aux tournois de Battle of the nations, avant de partir et fonder avec une douzaine de pays la fédération de l’IMCF que l’on connait. Évidemment, la médaille d’or remportée par la québécoise Béné et l’hymne national improvisé à la dernière minute qui a enthousiasmé les spectateurs et les participants, a contribué à nous faire connaître davantage. À mon avis, il serait vraiment malvenu qu’un jour l’Ost entre dans le giron de l’équipe canadienne, de même que les équipes écossaise et galloise au sein de l’équipe anglaise, du moins à l’IMCF.

L’équipe féminine québécoise qui participe pour la première fois au béhourt, est représentée aussi dans toutes les catégories de duel, même chose pour l’équipe masculine. Toutefois l’équipe est encore insuffisante pour compétionner dans les catégories de 10 X 10 et 16X 16, un jour peut-être…

Cette année, y aura une nouveauté, au lieu du traditionnel « all v/s all  » on tentera de faire un combat «Ancien contre Nouveau monde», donc l’Europe contre l’Amérique et la Nouvelle-Zélande. L’Asie n’y est pas cette année et l’Afrique du sud est représenté par un seul combattant. Aussi, Ben a demandé de l’aide à quelques combattants qu’il considère comme de très bons communicateurs et ensemble ils ont créé une équipe de commentateurs sportifs pour le «streaming». En effet, les quatre journées de tournoi seront filmées et les combats commentés comme c’est souvent fait pour le sport traditionnel à la télévision. Le but étant de rendre le tournoi intéressant à suivre pour ceux et celles qui le suivront sur Internet et du même coup, démystifier ce nouveau sport en donnant des explications sur ce qu’on voit à l’écran.  

Alors que nous errons moi et Ben, ne sachant pas trop où donner de la tête, tellement y a de choses à faire et de gens à voir, j’entends mon nom exclamé avec beaucoup de joie puis je reconnais mon amie Silvia, connue à Belmonte deux ans auparavant et avec qui j’ai régulièrement des nouvelles via Facebook. Après une chaleureuse accolade, elle en fait une à Benoit qu’elle rencontre en vrai pour la première fois. Nuno vient chercher Ben parce qu’il a besoin de lui, on se donne rendez-vous pour luncher un peu plus tard, puis moi et Silvia allons faire un tour au «french ghetto» après tout, même si elle ne se bat pas et qu’elle ne dort pas sous la tente, elle fait partie de l’entité francophone. Elle s’y sent d’ailleurs bien confortable puisqu’elle est aussi française d’origine portugaise et qu’elle connaît plusieurs personnes sur notre campement, en particulier notre ami Julien qui vient en tant que capitaine de son équipe. Elle connait aussi les Québécois dont elle a fait la connaissance à Belmonte, c’est-à-dire, Andrew, Régis, Yan, Nicolas et moi. Elle ne connaît pas encore les Belges, mais comme c’est une personne très sociable, ce n’est qu’une question de temps avant qu’elle ne connaisse à peu près tout le monde dans notre petit quartier temporaire. En plus elle connaît bien l’équipe portugaise sans compter qu’elle est ici au pays de ses parents, ce qui fait d’elle une aide bien précieuse pour la traduction.

Au bout d’un moment, Ben me rejoint et avec quelque uns d’entre nous, nous allons diner au restaurant du village, du moins celui assez grand pour accueillir plus d’une cinquantaine de personnes. C’est le second quartier général de l’IMCF, le premier étant la maison dans la forteresse où réside Nuno et sa femme Isabel durant le tournoi. C’est dans la maison qu’aura lieu tous les matins, les meetings du présidium, des capitaines de chaque équipe et des arbitres. Ces rencontres sont essentielles au bon fonctionnement du tournoi, on y discute de l’horaire, de la journée précédente, de transmettre des annonces, des avertissements, etc.

Sur les tables, des petits bols d’olives servent d’amuse-gueule comme chez-nous avec les paniers de pains, grissols et beurre, et au lieu des carafes d’eau, ce sont des bouteilles de vin rouge qui sont servies, Nuno nous informe que le propriétaire de ce restaurant fait un rabais à tous ces visiteurs venus de loin pour égayer le village durant la semaine et qu’il n’hésite pas à nous abreuver de son vin maison à très peu de frais ( parfois gratuit, parfois y a un prix minimal de base et puis les verres se remplissent à volonté). Son restaurant sera plein toute la semaine. Après que Benoit m’ait présenté Eduardo, le capitaine de l’équipe portugaise, personnage très sympathique et drôle, ainsi que deux autres Portugais, nous choisissons un plat proposé par nos voisins de table et mangeons avec appétit. Le restaurant est très animé entre la clientèle portugaise habituelle qui se réunit apparemment souvent dans cet endroit, nous les étrangers d’origines diverses qui chaque année se retrouvent avec éclats et s’interpellent d’une table à l’autre et les employés qui tentent de satisfaire tout ce beau monde.








Plus tard, nous remontons là-haut à la forteresse, c’est une sacrée remontée mine de rien, c’est pourquoi, un escalier roulant a été aménagé, judicieusement caché dans les murs. Pour le moment il est brisé, et des réparateurs sont censés venir s’en occuper aujourd’hui, ce qui facilitera grandement le transport de sacs d’armure. Pour le moment, moi et Benoit prenons les rues et j’en profite pour prendre quelques photos. La balade m’épuise un peu, et lorsque nous arrivons au campement je n’aspire qu’à un coin frais, loin du soleil pour dormir un peu. C’est la première fois qu’un voyage et décalage horaire me fatiguent autant, je mets mes petites inquiétudes dans un coin de ma tête et me secoue un peu. Je me trouve un coin sous l’auvent du campement et m’y assois pour discuter avec les gens présents, ceux que je connais déjà et ceux que j’ai envie de connaître davantage. J’ai connu Laurie et Christine lors du tournoi hivernal d’il y a quelques mois, comme j’ai fait deux robes à Laurie à ce moment-là, nous avons pu échanger un peu, et j’avais été touchée par sa confiance aveugle en moi et sa jovialité contagieuse. Mais jusqu’à maintenant je n’avais pas eu l’occasion de jaser avec Christine qui pour l’instant est partie chercher Laurie et Béné à l’aéroport.

Tout naturellement et en un rien de temps, les mamans du groupe présent, Gabrielle, Silvia et moi, nous nous retrouvons en terrain commun à discuter de ce qui nous est le plus cher, nos enfants. Tout autour, des combattants inspectent, réparent, solidifient leur matériel en émettant de temps en temps des commentaires ou discutant entre eux. Andrew arrive avec Cloé, tous les deux sont un peu déprimés, ils ont passé une partie de l’après-midi au téléphone avec l’aéroport pour savoir où ils en sont avec l’armure. Ils sont maintenant fixés, l’armure arrivera demain dans la journée, mais Cloé doit se battre en matinée, nous sommes sceptiques qu’elle l’ait, du moins pour commencer. Christine arrive un peu après avec les filles et est mise au courant de la situation, elle offre de lui prêter la sienne toute neuve, comme l’équipe de filles ne se bat pas demain, celles-ci peuvent accommoder leur co-équipière. Christine et Gabrielle font essayer des pièces à Cloé et en moins de deux, notre combattante a une armure complète pour commencer sa journée.   

Christine m’apparaît comme un exemple de positivisme et même si elle est nouvelle, elle a pris rapidement sa place au sein du groupe et en la regardant aller, je suis certaine que je vais bien m’entendre avec cette fille. Nous jasons un peu, mais le jour tombe et le campement est rapidement envahi, comme si tout le monde s’était donné le mot : On a faim où pouvons-nous manger? Benoit arrive et me demande si j’ai envie de l’accompagner, il doit souper avec Hubert, le président et son ami concepteur de vidéo qui offre de prendre des images avec son drone pour ensuite faire des montages. Comme je suis fatiguée et par conséquent je n’ai pas envie d’être dans un groupe bruyant, je préfère me joindre à eux plutôt que la gang du Québec. Sans compter que je veux profiter de ces rares moments où je peux être un peu avec mon amoureux.


Benoit informe le groupe pour le restaurant en bas au village, et de toute façon, c’est là que nous mangerons nous aussi, mais à une table isolée pour pouvoir discuter. Moi je sais que malgré la fatigue, je me laisserai gagner par la curiosité à observer cette foule contente de se réunir encore cette année.







mardi 6 juin 2017

Portugal mai 2016

 
Reflet pensif, photo prise à partir de mon siège dans le train, en voulant photographier dehors

En pyjama sur mon lit, mes bagages terminés à côté de moi, j’écoute l’oiseau qui chante à ma fenêtre me rappelant qu’on s’envole nous aussi ce soir. Mon chum qui tente de tout faire entrer (armures, vêtements et autres) dans ses sacs est en phase TDAH à fond, c’est très divertissant! Je ne peux m’empêcher de trouver ce genre de situation très ironique et parfois cocasse, quand il a du mal à gérer des trucs super anodins du quotidien tout en étant super performant comme il l’a été ces derniers mois, en tant que vice-président en organisant un tournoi où sont attendues environ 50 000 personnes et où évolueront plusieurs centaines de participants. Le petit appart dans lequel nous avons aménagé le mois dernier a été une vraie fourmilière pour la confection de costumes et la réorganisation de nos vies. Avec nos deux ordinateurs ouverts à longueur de journée, nous avons établi un véritable réseau en communication constante avec les autres membres du Présidium, le board des capitaines des autres équipes dans le monde, avec Nuno au Portugal, avec AirBNB pour trouver des condos pour notre équipe, avec les compagnies de location de voiture, avec la fédération ici, avec les marchands qui seront sur place, avec différentes agences de presse et j’en oublie!

Pas étonnant qu’il ait toujours autant de problème avec sa digestion, d’ailleurs nous croyons de plus en plus qu’il fait partie de ces gens qui ont le côlon irritable et les probiotiques super puissants ne font plus tellement effet, mais pour le moment Benoit met le problème de côté en se promettant de s’y mettre sérieusement à notre retour. Il n’a pas tellement le choix, il est toujours fatigué et son corps manque sérieusement de nutriment à force de ne pas digérer certains aliments essentiels. Il est très inconfortable dans son corps après tous les repas, tant et si bien qu’il en vient à avoir peur de manger. S’il ne fait rien en revenant c’est moi qui vais le trainer de force chez le médecin (j’ignore encore comment je vais m’y prendre, je trouverai bien).

Andrew, Cloé et Luc embarquent sur les billets de Ben, ça le stresse un peu car c’est plus difficile d’obtenir cinq places en standby. Toutefois, nous atterrissons à Paris, et nous prendrons ensuite un vol Paris-Porto, Paris étant une destination plus populaire, il y a donc plus de vols et plus de places pour nous à partir de Montréal. Nous nous retrouvons tous les cinq, trois heures à l’avance pour l’enregistrement de nos bagages, puis allons manger un peu au Burger King, conscients que notre prochain repas dans l’avion est encore loin. C’est un autre des aspects des billets de Benoit, comme il y a souvent des surprises inattendues, nous et nos invités devons être sur place quelques heures à l’avance pour qu’il puisse bénéficier d’un laps de temps raisonnable pour trouver une solution si nous n’embarquons pas, comme prendre un autre chemin.

Lorsque nous passons la sécurité, l’agent demande à Cloé d’ouvrir son sac, et c’est là qu’elle trouve une grosse paire de «cutters» à métal qu’elle croyait avoir perdue, étonnamment l’agent finit par la laisser passer…avec ses ciseaux. D’ailleurs en quittant la sécurité elle rigole un peu en nous rappelant le danger que pourrait représenter cet outil, des mains malveillantes pourrait couper la carotide de quelqu’un en un rien de temps, Benoit la supplie de se taire, question qu’aucun agent ne regrette finalement sa décision.

Pour le moment tout semble aller bien pour nous, Benoit jette un coup d’œil fréquent aux vols à partir de son compte, il reste encore de la place. Nous craignons parfois que des employés comme lui s’enregistrent à la dernière minute, et dans le cas où ils ont plus d’ancienneté, ils passent devant nous, ça arrive parfois et c’est très frustrant. Comme nous sommes cinq, la menace est d’autant plus grande de ne pas pouvoir tous embarquer, mais finalement la chance nous sourit.

Après un vol de six heures sans histoire, nous atterrissons à Charles de Gaules et c’est un peu la course pour passer les douanes et récupérer nos bagages, car nous devons nous rendre à l’aéroport d’Orly pour prendre notre vol pour Porto. Comme toujours la récupération des bagages prend une éternité dans cet aéroport, c’est donc en catastrophe que nous quittons en taxi. Les travaux sur la route et les embouteillages risquent de nous faire rater notre vol, le chauffeur nous assure qu’il fait du mieux qu’il peut et nous dépose juste devant notre porte. Notre vol est sur le point de commencer l’embarquement, nous avons environ 45 minutes pour enregistrer nos bagages, passer la sécurité et présenter notre billet acheté et imprimé il y a quelques semaines. Je cours au-devant du groupe pour avertir l’agent au comptoir que nous sommes en retard et que nous risquons de manquer notre vol, pendant que tout le monde ramasse la tonne de bagages, grosso modo une dizaine de grosses valises et de gros sacs de sport, plus nos bagages de cabine. J’entre en courant comme une demeurée et passe directement au travers des allées, normalement pleine de gens en ligne, mais actuellement vides puisque les passagers sont sur le point d’embarquer dans l’avion. J’arrive au comptoir, essoufflée et pousse un peu la note du dramatique pour forcer l’indulgence et explique en «fran-glais» (ne sachant quelle langue utiliser) à l’agente portugaise que nous sommes en retard. Un agent de sécurité se rue sur moi comme si j’avais déposé un bâton de dynamite sur le comptoir pour me faire comprendre qu’on ne passe JAMAIS directement au travers des cordes et des allées! Je dois avoir quelque chose qui attire la pitié dans mon regard implorant, car il devient ensuite un peu plus conciliant. La dame au comptoir ne semble pas alarmée outre-mesure et commence à prendre les bagages après que nous lui présentions nos cartes d’embarquement et notre passeport. Sa lenteur me fait encore plus paniquer, j’ai pas une patience d’ange déjà en temps normal, je piétine et tente de garder mon calme. Benoit me dit que normalement si nous n’avions pas le temps de nous rendre à la porte, elle n’enregistrerait pas nos bagages, n’empêche, je ne miserais pas là-dessus.

Ce qu’il y a de bien avec les aéroports plus petits, c’est que nous avons moins long à courir pour arriver à la sécurité qui est pratiquement vide et ensuite moins long à courir pour arriver à la porte pour embarquer quelques minutes avant le décollage. OUF! Aucun de nous n’est assez riche pour se payer le luxe de manquer son avion et être obligé de se racheter un billet. Sur ce vol, comme nous sommes des clients réguliers, nous avions la possibilité de choisir notre place, nous avons payé un supplément pour être tous assis ensemble dans la rangée du devant et ainsi avoir plus d’espace pour ceux qui ont des grandes jambes (je n’en fais pas partie ). Nous avions aussi payé pour avoir un petit snack, mais nous ne l’avons jamais eu finalement. Ils ont dit que c’était une erreur et que la compagnie aérienne nous rembourserait la vingtaine de dollars supplémentaires que ça représentait (que nous n’avons jamais eu non plus). On dit « qui dort, dîne » et c’est ce que la plupart d’entre nous faisons jusqu’à ce que nous arrivions à Porto.

À notre arrivée, nous passons rapidement les douanes et récupérons nos bagages, sauf un des sacs de Cloé qui n’y est pas. Nous allons au comptoir où un agent prend l’adresse de notre condo et nous assure que le sac arrivera sur le prochain vol et sera livré dans les plus brefs délais. On l’espère bien car c’est son armure et elle combat la première journée du tournoi, le surlendemain. Nous allons ensuite aux informations pour savoir où nous pouvons aller acheter un forfait pour le cellulaire d’Andrew et où se trouve notre compagnie de location de voiture avec qui nous avons loué une voiture. La personne au comptoir a un peu de mal à comprendre l’anglais mais comprend bien le français, elle nous donne un service à la clientèle efficace et souriant, ça commence bien notre séjour.

Nous prenons une navette fournie par la compagnie pour nous rendre au bureau et prendre possession de notre voiture de location. Au comptoir, nous apprenons que ça nous coûte beaucoup plus cher et que le montant qui est normalement gelé sur la carte de crédit est exorbitant, tellement, que nous devons prendre deux cartes et faire des pieds et des mains pour prendre enfin notre véhicule. Nous avions choisi un véhicule pour sept passagers avec bagages, comme nous avons beaucoup de valises et de sacs, mais que nous sommes cinq, nous étions confiants que nous aurions suffisamment de place, quoiqu’un peu serrés, mais bon. Nous avons oublié une règle élémentaire, en Europe, les véhicules sont souvent plus petits, résultats, si nous voulons mettre tous les bagages, ça ne laisse que l’espace pour trois passagers. Nous décidons moi et Ben de prendre le train, nous sommes fatigués, nous voulons être un peu seuls et puis nous avons envie de faire cette expérience. Tandis que les trois autres partent sur la route pour se rendre au condo qui est à une heure de là à Figueira da foz, petite ville pittoresque à quinze minutes de Montemor, lieu du tournoi.
 
À une gare, ça avait quelque chose de...western.


Pour moi et Ben, c’est passablement plus long, puisque nous devons reprendre la navette pour nous rendre aux portes d’entrée de l’aéroport, de là, descendre à la gare après avoir acheté notre billet de train. Nous devrons faire un transfert à mi-chemin, ce qui fait que nous devrons demeurer éveillés pour rester attentif car tout est écrit en portugais. Notre trajet dure environ deux heures et scrutons tous les panneaux à l’entrée de chaque gare, l’affiche du trajet dans le train et notre billet, jusqu’à ce que nous reconnaitrions les noms de nos arrêts. Quand nous sortons finalement du train, nous sommes exténués, affamés et cherchons Andrew qui doit venir nous récupérer à la gare de Figueira da foz. J’ai un peu mal au cœur d’avoir l’estomac vide et parce que c’est beaucoup de déplacements (avion, navette, train…) quand on souffre occasionnellement du mal des transports comme moi.

Au bout d’une quinzaine de minutes, Andrew, Luc et Cloé arrivent et nous cherchons attentivement un restaurant. Nous roulons en voiture dans les alentours, car il n’y en pas vraiment autour de la gare, mis à part un petit café.  En jetant un œil aux devantures des établissements, nous arrivons à comprendre si c’est un lieu où l’on sert à manger et vaguement ce qui est servi comme repas, première observation, beaucoup de poisson, de pieuvre et de calmars. Par dépit nous en choisissons un qui semble encore ouvert et assez achalandé, c’est toujours un bon signe. Quand nous passons la porte, un couple nous accueille chaleureusement avec un « Aye Benoit! », je mets quelques secondes à les reconnaître, les parents de Brendan! Ces gens si enthousiastes qui encourageaient tout le monde lors du tournoi à Galway, ce sont bien les dernières personnes que je me serais attendue à rencontrer ici au Portugal et surtout dans ce restaurant! Mais à vrai dire, ce n’est guère étonnant puisqu’ils sont venus passer des vacances dans le coin et par la même occasion encourager leur fils qui participe au tournoi qui n’est d’ailleurs pas arrivé encore.  


Nous sommes ravis sachant que nous les reverrons durant le tournoi, nous nous quittons sur le pas de la porte, eux s’en retournant à leur condo, nous pour s’attabler au fond de la pièce. Après un repas arrosé d’une bière locale, nous retournons rapidement à notre condo retrouver le reste des Québécois, pour se doucher et… dormir!   
Debout sur une butte, notre condo

Debout sur la même butte, l'océan.